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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 septembre 1864.

La convention du 15 septembre au sujet des affaires d’Italie sera peut-être un des événemens les plus considérables de notre siècle; mais en attendant qu’elle soit mieux connue, qu’elle ait été expliquée par la glose publique et contradictoire des principales parties intéressées, qu’on se soit mis d’accord pour y découvrir une signification simple et une tendance uniforme, il sera toujours permis de la considérer, quant à la façon dont elle s’est produite, comme un des faits les plus extraordinaires de notre époque. Depuis le pacte de famille du dernier siècle, il ne s’est pas accompli en Europe un acte aussi surprenant de diplomatie secrète. Un arrangement qui touche aux plus graves intérêts de deux grands peuples, la France et l’Italie, s’est conclu en effet en famille, comme on dit, sous le manteau de la cheminée, à l’insu de ces peuples, sans qu’ils y aient été préparés par des communications d’aucune sorte, sans qu’ils aient été mis en mesure de se former une opinion sur les combinaisons projetées, sans qu’ils aient eu le temps de comprendre et de digérer ces combinaisons. Certes nous ne cherchons point à soulever une chicane de formalisme constitutionnel, nous savons bien qu’en France et en Italie les chefs du pouvoir exécutif ont le droit constitutionnel de conclure des traités sans être tenus de les soumettre à l’approbation préalable des représentans naturels de l’opinion publique; mais même dans ces derniers temps, où les chefs de pouvoir ne se sont pas fait faute d’user de leur initiative, on nous avait accoutumés à d’autres prévenances envers l’opinion. Chacune des phases de la question italienne nous avait, par exemple, été annoncée par une de ces brochures anonymes qui avaient en Europe un retentissement qu’on n’a point oublié. Ces brochures mettaient pour ainsi dire les questions à l’étude; l’opinion, avertie à temps et aidée par le tour des événemens, modifiait toujours les directions qui lui étaient indiquées. C’était de la mise en scène, si l’on veut; mais cette mise en scène était encore un hommage rendu à l’opinion et