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de texte à plusieurs manifestations bruyantes dans lesquelles le nom du général Mac-Clellan était invoqué comme celui d’un sauveur. C’est alors que le correspondant du Times, fidèle écho du parti de la paix à tout prix, écrivait au sujet du célèbre général ces étranges paroles : « C’est un homme dont la politique évidente et la sécurité personnelle exigent qu’il se fasse maître et dictateur. Mac-Clellan a de grandes chances de succès. Dans quelques jours, nous saurons s’il a le courage ou le désir de les utiliser pour le bien de son pays. » Quant aux républicains, s’ils épargnaient dans leurs accusations le président et le secrétaire de la guerre, ils étaient d’autant plus acharnés contre M. Seward, le secrétaire d’état. Tous les partis réclamaient quelque victime expiatoire du désastre de Fredericksburg. Le 17 décembre, la majorité du sénat accueillit une proposition infligeant un blâme spécial à la politique du secrétaire Seward, et déclara « que, dans son opinion, une réorganisation partielle du cabinet serait de nature à augmenter la confiance de la nation. » MM. Seward et Chase offrirent leur démission et demandèrent à se retirer dans la vie privée; mais le président, prenant chaudement la défense de ses ministres, déclara que le bien public exigeait le maintien du cabinet dans son entier. Du reste, le général Burnside s’empressa généreusement de reconnaître que la faute commise devait lui être attribuée, et dédaigna d’accuser des subordonnés qui ne l’avaient pas secondé comme ils auraient dû le faire. « Je dois tout, écrivit-il au général Halleck, je dois tout aux braves officiers et soldats qui ont accompli la tâche difficile de franchir une seconde fois la rivière sous le feu de l’ennemi. Quant à l’insuccès de l’attaque, c’est moi seul qui en suis responsable, car la bravoure, le courage et la persévérance des soldats n’ont jamais été surpassés, et certainement l’armée aurait emporté la position, si cela eût été possible... Ma responsabilité est d’autant plus grande que j’ai pris cette ligne d’opérations contrairement à votre opinion, contrairement à celles du président et du secrétaire de la guerre, et que vous avez laissé entre mes mains toute la conduite de l’armée sans me donner d’ordres spéciaux. » C’était demander d’être relevé de son commandement. En effet, quelque temps après, le général Hooker, qui pendant la bataille de Fredericksburg avait vaillamment mené à l’assaut la division du centre, remplaça le général Burnside comme chef de l’armée du Potomac.

Tandis que les événemens du Rappahannock remplissaient de deuil dix mille familles du nord et créaient de très sérieuses difficultés politiques à l’administration, les fédéraux éprouvaient un autre grave insuccès sur les bords du Mississipi. Après la conquête de la Nouvelle-Orléans par l’amiral Farragut et celle de Memphis par le commodore Davis, un seul point important était resté, entre