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qu’il durerait. Il exprima donc l’espoir que le parlement adhérerait à toutes les propositions qui lui seraient soumises par ses ministres.

La politique du gouvernement fut vivement attaquée par Fox. Il était le premier, dit-il, à flétrir les crimes qui se commettaient en France, et déplorait les scènes de carnage qui ensanglantaient le continent; mais le duc de Brunswick en avait donné le signal par son manifeste, et sur lui ainsi que sur les négociateurs du traité de Pilnitz devait retomber toute la responsabilité de la lutte qui désolait l’Europe. D’ailleurs, quelque indignation que dussent causer les événemens dont la France était le théâtre, si on voulait les considérer comme un motif légitime de guerre, l’Angleterre n’avait pas un seul de ses alliés avec qui elle pût rester en paix. Tous en effet avaient commis les actes de despotisme les plus répréhensibles, et la Pologne n’était-elle pas en ce moment même l’objet de traitemens révoltans? Sans doute on pouvait invoquer les sentimens de haine professés par les républicains français contre l’Angleterre, et leur esprit d’agression et de conquête; mais qui avait plus haï l’Angleterre que Louis XIV? Qui avait eu plus que lui l’esprit d’agrandissement? La paix cependant avait été conclue avec lui à Ryswick. Pourquoi ne le serait-elle pas aussi avec la convention? C’est en vain qu’on avait voulu détruire le pouvoir de cette assemblée; elle avait triomphé des insurrections intérieures, battu les armées de l’Europe, et, défendant la cause de l’indépendance et de la liberté, elle était assurée d’être soutenue par toute l’énergie nationale. On pouvait donc traiter avec elle en toute sécurité. Fox termina en demandant que le roi fut prié de faire la paix dès qu’il y aurait moyen de la conclure honorable et avantageuse, et sans avoir égard à la forme de gouvernement qui existerait en France.

Pitt répondit qu’il souhaitait aussi la paix, mais qu’elle n’offrirait aucune sûreté, faite avec un pouvoir tel que celui qui dominait alors en France. Ne venait-il pas en effet d’abolir la religion, de s’emparer des propriétés privées, et ne professait-il pas des principes aussi destructeurs de l’ordre général des sociétés que contraires à la stabilité des gouvernemens? Ces principes, il cherchait à les répandre par la conquête dans toute l’Europe, et l’Angleterre avait un puissant intérêt à combattre énergiquement une pareille propagande. D’ailleurs des décrets de la convention défendaient de négocier avec tout ennemi qui, au préalable, n’aurait pas évacué le territoire de la république, et reconnu son unité et son indivisibilité. Pour traiter avec la France, il fallait donc se mettre à sa merci, accepter ses conquêtes, lui restituer ses anciennes possessions. L’Angleterre était-elle disposée à subir de pareilles conditions? et lors même qu’elles ne lui seraient pas imposées, ne s’exposerait-elle