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chambre des communes pour lui faire connaître que vu l’état des affaires il croyait indispensable d’augmenter les forces de la marine et de l’armée, et il ajouta « qu’il comptait sur le concours du parlement pour assurer la sécurité du territoire, venir au secours de ses alliés et combattre les projets d’agrandissement de la France, dont l’ambition exigeait une surveillance plus rigoureuse que jamais à cause de ses nouvelles doctrines politiques et gouvernementales. »

Le lendemain, Pitt proposa à la chambre de voter une adresse au roi pour le remercier de sa communication et lui déclarer qu’elle s’associait complètement à ses vues. Cette motion fut combattue par Fox, Tout en déplorant l’acte odieux qui venait de s’accomplir en France, tout en le flétrissant dans le langage le plus noble et le plus énergique, le grand orateur insista néanmoins sur ce que, le crime ayant été commis dans un état indépendant, l’Angleterre n’avait à exprimer aucun blâme. « L’Angleterre même, dit Fox, n’avait-elle pas contracté des alliances avec le Portugal et l’Espagne ? et cependant leurs gouvernemens étaient coupables des actes les plus atroces de superstition et de despotisme. En avons-nous pris prétexte pour leur déclarer la guerre ? Avons-nous recherché comment leurs princes étaient arrivés au trône ? Pourquoi donc voudrions-nous agir autrement dans cette circonstance ? » Fox s’efforça d’établir ensuite que dans la lutte engagée entre la France et les puissances alliées l’agression avait été du côté de ces dernières. Leur but était le rétablissement du despotisme en France, et l’Angleterre ne saurait y coopérer, parce qu’il était de principe incontestable que la forme du gouvernement d’un état indépendant doit être fixée par ceux qui vivent sous ses lois et non par la force, et que la nation, étant souveraine dans chaque état, a le droit de renvoyer ceux qui la gouvernent quand ils ont abusé de leurs pouvoirs, comme cela s’était fait en 1688 pour Jacques II. Il était loin sans doute d’approuver la conduite des hommes qui exerçaient l’autorité en France, mais il devait rappeler et rétablir les principes. Un des adversaires les plus anciens et les plus importans du cabinet, Wyndham, crut devoir protester contre des théories suivant lui aussi fausses que dangereuses, et surtout contre cette doctrine funeste qui attribuait à la majorité du peuple le droit de faire et défaire les gouvernemens au gré de son caprice ; mais ce n’était ni le cas ni le lieu de discuter à fond de pareilles questions. Il s’agissait pour le moment d’apprécier la nature des rapports de la France avec l’Angleterre. Or, d’après les dispositions avouées des hommes qui gouvernaient ce dernier pays, la guerre entre les deux nations semblait inévitable, et l’Angleterre devait l’entreprendre résolument pour assurer sa sécurité et combattre les principes sub-