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L’EXPÉDITION
DE COCHINCHINE
ET
LA POLITIQUE FRANÇAISE DANS L’EXTRÊME ORIENT

L’opinion publique dans ces dernières années s’est vivement prononcée contre les expéditions lointaines. Après notre intervention en Chine, notre guerre du Mexique, notre occupation de la Basse-Cochinchine, on s’est inquiété des charges que ces opérations imposaient à nos finances. On s’est demandé si elles étaient justifiées par un intérêt national, si elles étendraient notre influence dans le monde, si, le but une fois atteint, elles nous dédommageraient suffisamment des embarras et des difficultés qu’on aurait rencontrés dans l’exécution. Il appartient sans doute au gouvernement d’un grand état de concevoir de vastes desseins et de montrer qu’il sait et peut les accomplir : il étend ainsi son prestige et entretient la bonne opinion qu’on a dans le monde de son habileté et de ses ressources; mais, pour que cette initiative soit utile, il faut qu’elle soit opportune et qu’elle n’ait pas à craindre d’être entravée dans son action par des événemens qui viendraient impérieusement réclamer toute la sollicitude du pays. Si l’on en doutait, qu’on se reporte à une époque qui n’est pas encore bien éloignée. La conquête de l’Algérie fut un legs glorieux de la restauration au gouvernement de 1830. Ceux qui l’entreprirent ne soupçonnaient pas qu’à peine l’aurait-elle entamée, la France verrait éclater une révolution qui susciterait à son gouvernement toutes les difficultés intérieures et extérieures dont un établissement nouveau est toujours assailli.