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au porteur, et tout était combiné pour en faciliter la circulation. La prospérité de cet établissement alla toujours croissant; en 1859, il avait en dépôt 50 millions; au commencement de 1863, il en comptait plus de 100. Avec ces fonds, la caisse milanaise opère à peu près comme une banque. Elle les emploie surtout en prêts sur hypothèque; sur les 100 millions dont elle peut disposer actuellement, les trois quarts ont cette destination. Ces prêts, qui étaient faits autrefois à courte échéance, sont maintenant remboursables par annuités, et de grandes facilités sont données aux emprunteurs pour combiner les conditions de leur libération. La caisse milanaise devient donc une sorte de crédit foncier, et rend à la propriété des services signalés. Elle est restée d’ailleurs une institution de bienfaisance; elle n’a pas d’actionnaires, et ses administrateurs ne reçoivent aucun traitement. Comme elle donne ordinairement 3 1/2 pour 100 à ses déposans, et qu’elle retire 4 1/2 de son argent, elle emploie un cinquième de ses bénéfices en œuvres de bienfaisance; le reste accroît le fonds de réserve appliqué à la garantie des dépôts. Dans quelques cas cependant l’administration de la caisse grossit le budget de la bienfaisance ou l’intérêt servi aux déposans[1]. La caisse d’épargne de Milan, qui dispose, comme on vient de le voir, d’un capital considérable, est de beaucoup la plus importante du royaume. On en compte d’ailleurs cent cinquante autres, dont un tiers établi depuis les annexions; celles de Toscane, des Romagnes, de l’Ombrie, des Marches, sont, comme la caisse lombarde, des institutions privées et opèrent d’une façon analogue; celles des duchés appartiennent aux communes.

Arrivé au terme de cette étude, nous ne pouvons qu’applaudir à cet esprit d’initiative individuelle et municipale qui donne à la nation italienne un de ses caractères distinctifs. Pour nous rendre compte des progrès que cette nation a réalisés depuis la guerre de l’indépendance, nous avons pris quelques exemples choisis surtout parmi les faits qui sont du domaine de la statistique. Nous avons vu quelles bases les Italiens ont cherché à donner à leur édifice administratif, comment ils ont formé leur armée, quelles sont leurs premières tentatives pour accroître la richesse nationale. En regard de ces exemples du développement matériel, il a paru inutile de placer quelques indications sur le développement intellectuel du pays, sur le mouvement des lettres, des arts, des sciences[2]. Les lettres, les arts, les sciences, l’Italie n’est-elle pas leur terre classique? Ce

  1. C’est ainsi qu’au 1er janvier 1864 cet intérêt vient d’être porté à 4 pour 100.
  2. On trouvera d’intéressans détails sur les institutions scientifiques et universitaires de l’Italie dans l’étude d’un juge bien compétent en cette matière, M. Matteucci. Voyez la Revue du 1er octobre 1863.