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féré et obtenu une intendance, La Reynie vendit sa charge à d’Argenson moyennant 50,000 écus (janvier 1697). Il restait d’ailleurs conseiller d’état en service ordinaire, et ces fonctions devaient lui faire une vieillesse encore suffisamment occupée. Dans l’année qui suivit, il fut chargé d’interroger à la Bastille la célèbre Mme Guyon. Un an après, le chancelier Boucherat étant mort, La Reynie fut cité avec plusieurs autres personnages pour le remplacer; mais Pontchartrain, fatigué des finances, aspirait aux honneurs de la chancellerie, et fut préféré par le roi, qui avait besoin de sa place pour Chamillart. Douze années s’étaient écoulées depuis que La Reynie avait résigné ses fonctions actives, et, son énergie morale persévérant, il refusait de se plier aux conséquences de l’âge et des infirmités. Plus ses forces le trahissaient, plus il se rattachait aux affaires. Il fallut que Pontchartrain l’en arrachât par un coup d’autorité. « J’espérois vous voir au conseil à Paris jeudi dernier, lui écrivit-il le 2 décembre 1708, et je m’en faisois le plaisir que vous savez que j’ai toujours quand je vous vois. J’appris avec douleur que votre santé, qui malheureusement s’altère tous les jours, vous avoit empêché d’y venir, et cela me confirme avec grand regret dans l’exécution d’une pensée que je vous aurois simplement communiquée, si je vous avois vu. Cette pensée est de vous soulager malgré vous-même dans votre travail, et de le diminuer, quelque utile qu’il soit au public. Vous tenez trois bureaux, celui des vacations, un des parties, un des finances. Souffrez que je vous soulage du premier; c’est celui qui vous fatigue le plus. Il exige même plus que tous les autres, pour le bien de la justice et pour l’honneur des cours dont on attaque les arrêts, que celui de messieurs les conseillers d’état qui a l’honneur de présider à ce bureau soit régulièrement et exactement présent au conseil et à toutes les cassations qui s’y rapportent. Vous savez cependant, et nous ne l’éprouvons qu’avec trop de douleur, que vous ne venez plus au conseil depuis très longtemps... »

L’avertissement était formel, et force fut à La Reynie de s’exécuter. Dépossédé pour n’avoir pas su se retirer à temps des fonctions qu’il avait prétendu conserver au-delà des limites naturelles, il dut, tout en se plaignant et récriminant, se replier sur lui-même et attendre l’heure finale. Il avait fait le 1er septembre 1696 un testament dont quelques dispositions ont été remarquées. En premier lieu, son corps devait être enterré dans le cimetière de sa paroisse et non dans l’église, « ne voulant pas, disait-il, que son cadavre fût mis dans les lieux où les fidèles s’assembloient, et que la pourriture de son corps y augmentât la corruption de l’air et par conséquent le danger pour les ministres de l’église et pour le peuple. » On reconnaît dans ces recommandations dernières la sollicitude du ma-