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d’après un rôle arrêté par le roi, la somme de 37,515 livres à distribuer entre diverses personnes « tenues de retirer leurs bâtimens et héritages et laisser la place nécessaire pour l’élargissement de ladite rue... » Une autre mesure d’une importance considérable avait été adoptée deux ans plus tôt. L’alignement des anciennes rues et la construction des nouveaux quartiers s’étaient faits jusqu’alors sans vue d’ensemble, sans plan régulier. Il en résultait que, les rues principales ne se reliant pas entre elles, Paris était plutôt la réunion de plusieurs cités juxtaposées qu’une grande et unique ville construite ou agrandie avec une certaine harmonie. Des lettres patentes du mois de juillet 1676 approuvèrent un plan de Paris qui devait désormais servir de base aux améliorations. « Après avoir, disait Louis XIV, donné la paix à nos peuples par la force de nos armes, nous avons considéré les ouvrages publics et tout ce qui pouvoit procurer les commodités à notre royaume comme un objet digne de notre application, et nous l’avons employée particulièrement pour notre bonne ville de Paris, afin que la capitale de nos états en pût mieux faire connoître la grandeur aux étrangers par le nombre et la beauté de ces ouvrages, et marquer à la postérité le bonheur de notre règne. » Colbert reconnaissait dès 1671 que la capitale donnait le mouvement au royaume, et que toutes les difficultés suscitées au gouvernement avaient leur point de départ dans les grandes compagnies dont elle était le siège. Il est incontestable que les travaux exécutés sous son ministère et la sécurité dont on était redevable à La Reynie durent augmenter l’importance politique et la population de Paris.

Quel était alors le chiffre de cette population parisienne? Un document officiel, remontant à 1670, constate qu’il y avait eu dans l’année 16,810 baptêmes, 3,930 mariages et 21,461 morts[1]. Frappée de cet excédant considérable des morts sur les naissances, l’administration l’expliquait par la grande quantité d’étrangers qui faisaient de Paris leur séjour habituel. Les calculs les plus vrai- semblables permettent de croire que la population ne dépassait guère, vers la fin du XVIIe siècle, le chiffre de 500,000 habitans. Il est plus malaisé de déterminer, même approximativement, le nombre de gens assistés par la charité publique, soit dans les temps ordinaires, soit aux époques de disette. En 1693, à la suite de quelques mauvaises récoltes, les mendians de la campagne affluèrent dans la capitale. On aurait bien voulu les refouler dans leurs villages; mais, comme il s’agissait pour eux de ne pas mourir de faim, ils résis-

  1. État général des baptêmes, mariages et mortuaires des paroisses et faubourgs de Paris en 1670. (Bibliothèque imp., Mss. Mélanges Clairambault, vol. 159.)