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vrai dire, existent en Hollande. Les gros transports se font tous par eau, et dans toute la région basse il n’est pas une ferme qui n’ait creusé son bout de fossé, afin de se mettre en communication avec le canal le plus rapproché. Comme les statistiques ne tiennent pas compte de ces innombrables fossés navigables, on ne peut, d’après les chiffres qu’elles donnent, se faire une idée des facilités de transport dont jouit l’agriculture dans cette contrée. Au XVIe et au XVIIe siècle, quand ailleurs les charrois ne se faisaient qu’à grand renfort de chevaux, et que les marquises en voyage devaient en atteler huit à leur carrosse, qui ne s’en embourbait pas moins, alors déjà les étrangers s’étonnaient de voir ces routes si admirablement entretenues, ces canaux sans cesse animés d’une foule innombrable de bateaux, et très semblables pour le mouvement aux rues d’une grande ville.

Malheureusement la région haute était restée dans son isolement, et, faute de matériaux, ses seules voies de communication étaient l’ancien chemin de sable serpentant à travers la bruyère; mais récemment on a songé à tirer parti des pierres et du gravier que le diluvium du Rhin, de la Meuse et de l’Escaut avait enfouis dans le sol, et avec ces petits fragmens roulés de silex, de granit et de basalte, on fait d’excellentes routes macadamisées (grindwegen). Partout ailleurs c’est dans les régions argileuses qu’on trouve les chemins de terre les plus défoncés, les plus coupés d’ornières et les plus impraticables. Ici on a trouvé moyen de les rendre aussi durs, aussi unis, aussi bons qu’un dallage d’asphalte, grâce à la bonne entente des cultivateurs et à leur esprit de prévoyance. De temps en temps, dès que de petites ornières se forment, et surtout au printemps, on donne aux chemins un léger labour avec une forte herse de fer, on les dispose en des d’âne, puis on les foule avec de grands, rouleaux de bois ou de pierre; l’eau s’écoule, le soleil durcit l’argile et la transforme en une sorte de ciment, sur lequel on roule comme sur le meilleur macadam. Pour obtenir cet excellent résultat, auquel on pourrait arriver dans toutes les régions de terre forte, le travail à exécuter est, on le voit, extrêmement facile et peu dispendieux; mais il doit être fait à temps. On comptait dans les Pays-Bas, à la fin de 1861, 8,716 kilomètres de routes pavées ou empierrées, 362 de chemins de fer et 2,916 de canaux, sans compter les innombrables fossés navigables de la région basse. Ce grand golfe intérieur, le Zuyderzée, et les grands estuaires des fleuves offrent aussi à l’agriculture des facilités extrêmes. Les rivières ne sont pas seulement ici, comme dit Pascal, des chemins qui marchent; ce sont des chemins qui, grâce à la marée, vont et viennent dans les deux sens, de sorte qu’on peut toujours partir avec le flux et rêve-