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leste, tel qu’une éclipse, dont l’effet est instantané pour tous les lieux de la terre. Les éclipses des satellites de Jupiter fournissent d’utiles indications aux navigateurs ; mais les phénomènes de ce genre n’étant pas assez fréquens pour les usages de la géodésie, on y supplée au moyen de signaux artificiels, comme une fusée que l’on fait partir pendant la nuit entre deux observateurs qui pointent l’heure où elle leur est apparue. Cette méthode fut essayée en France en 1824 et 1825 par les ingénieurs géographes qui déterminèrent les longitudes sur le parallèle moyen et sur le parallèle de Paris à Brest. On en fit une autre application en 1825 entre les observatoires de Paris et de Greenwich. Aujourd’hui les fusées sont remplacées par des signaux télégraphiques. Il n’est pas, on le conçoit aisément, de procédé plus parfait que le télégraphe électrique pour produire des signaux instantanés en deux localités éloignées, fussent-e1les distantes de plusieurs centaines de kilomètres. C’est un système très expéditif et moins coûteux que la triangulation géodésique. Les Américains du nord n’ont pas employé d’autre méthode sur leur immense continent, et ils prétendent être arrivés à connaître la longitude aussi exactement que la latitude. En Europe, où les réseaux géodésiques étaient achevés en général avant que l’on eût songé à transmettre les signaux par l’électricité, la méthode télégraphique ne peut que vérifier les résultats déjà connus. En France, on en a déjà fait quelques applications ; mais les opérations entreprises en dehors des deux corps savans, le bureau des longitudes et le dépôt de la guerre, qui, conservent les saines traditions géodésiques, ne sont que des essais sans importance, plus propres à mettre en relief les avantages du système qu’à. contrôler systématiquement les calculs de l’ancienne triangulation.

Les ingénieurs disposent donc de plusieurs méthodes propres à contrôler les mesures de triangles qu’ils ont faites sur la surface du pays. La géodésie, qui fournit la longitude et la latitude de chaque signal, a encore l’avantage d’en donner l’altitude, c’est-à-dire l’élévation au-dessus du niveau moyen des mers. La hauteur des montagnes s’obtient ainsi avec autant de rigueur que par les nivellemens les plus délicats. Dans le lever de la carte des îles britanniques, la hauteur d’un des principaux sommets de l’Ecosse, le Ben-Macdui, fut trouvée par le calcul géodésique de 1,300m,16, et deux nivellemens opérés sur la même montagne, l’un de bas en haut et l’autre de haut en bas sur un autre versant donnèrent le même chiffre à 4 ou 5 centimètres, près. La mesure des altitudes est une des parties les plus importantes de la géographie, car il ne suffirait pas de dessiner sur le papier l’emplacement des villes, le tracé des routes, le cours des rivières ; il faut encore peindre les accidens du terrain et rendre sous une forme sensible à l’œil le creux des val-