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mis en usage depuis quelques années, il est permis d’exiger un accord plus parfait entre les résultats du calcul et ceux de l’observation directe. Aussi a-t-on déjà senti la nécessité de reprendre en beaucoup de points les mesures géodésiques terminées il y a vingt ans environ.

On connaît donc, à un mètre près, la longitude et la latitude de tous les points géographiques qui font partie de la triangulation principale. On sait au juste quelle position il faut donner sur la carte à Paris, Brest, Strasbourg, Bordeaux, Rhodez, enfin à deux ou trois cents localités éparses sur toute la surface du pays. Les intervalles entre ces points de premier ordre ont ensuite été remplis par la triangulation secondaire, qui exigeait moins de soin, parce que les distances étaient moins grandes, et que les erreurs d’observation ne pouvaient plus s’accumuler autant. L’excessive précision des mesures précédentes n’étant plus nécessaire, on a pu choisir des méthodes plus expéditives, répéter moins souvent les angles et faire usage d’instrumens plus portatifs. Il est à remarquer qu’on n’a trouvé dans toute l’étendue de la France qu’un très petit espace où la triangulation fût d’une exécution difficile : c’est la plaine très plate qui s’étend entre Meaux, Châlons et Reims. Comme il eût fallu élever des signaux d’une hauteur démesurée et d’un prix exorbitant, on a laissé là un vide qui est sans importance dans le réseau général. La triangulation de deuxième ordre a donné environ quatre cents points toujours très exacts, et de chacune de ces stations on a relevé enfin avec moins d’application et plus rapidement encore tous les clochers que l’on pouvait viser, tous les lieux remarquables qui, reportés sur la carte, servent de repère et de canevas pour le lever définitif des détails du terrain.

On s’étonnerait de l’extrême minutie de ces divers travaux, si l’on ne savait par expérience combien d’erreurs contiennent les cartes qui n’ont pas eu pour canevas un bon réseau trigonométrique. Il y a encore peu de pays qui aient été levés par des procédés géodésiques, et la plupart des cartes que nous avons entre les mains ont été dressées à l’aide de méthodes beaucoup moins parfaites. Lorsqu’il n’est pas indispensable d’obtenir une exactitude rigoureuse, on peut se contenter en effet de reporter sur le papier les localités importantes d’une contrée au moyen de la longitude et de la latitude telles que les fournit l’observation des astres. Les marins fixent par ce procédé la situation des ports de mer, des caps, des phares, des embouchures de rivière, des hautes montagnes, de tous les lieux en un mot qui attirent le plus directement l’attention du voyageur. En réalité, les cartes d’ensemble des continens et les planisphères ne sont pas établis sur d’autres données; mais ces observations, auxquelles il manque un contrôle commun, sont toujours douteuses.