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Parmi les industries annexes qui se sont formées autour de la grande industrie du gaz, il faut encore compter celle qui s’est attachée spécialement à la rendre transportable. Le problème était d’emmagasiner le plus grand volume possible dans des vases hermétiquement clos. Les inventeurs qui s’en occupaient ne pouvaient atteindre leur but que par une forte compression. On évitait ainsi les frais considérables et les chances de fuite des longs parcours dans des conduites souterraines, les altérations du sol et des plantations sur les voies publiques ; mais il fallait trouver les moyens de contenir le gaz sous cette énorme pression dans des enveloppes solides sans que le poids en fût trop considérable : Arago et Dulong étudièrent la question à ce point de vue et parvinrent à la résoudre provisoirement en limitant le diamètre des vases cylindriques, sauf à multiplier le nombre de ces récipiens.

Il restait à trouver une autre disposition qui permît de faire à volonté sortir le gaz, au moment de l’allumage, sous la pression faible et constante qui convient au développement d’une flamme lumineuse exempte d’oscillations. Plusieurs mécaniciens habiles, à l’aide d’ingénieuses combinaisons de robinets dont la pression elle-même réglait l’ouverture très minutieusement graduée, atteignirent le but ; mais en somme la construction de tous ces récipiens et appareils était trop dispendieuse, le pouvoir éclairant du gaz trop limité pour que l’industrie dans ces conditions devînt profitable. Déjà quelques établissemens fondés sur ces principes avaient succombé lorsque deux inventions remarquables, dues à Houzeau-Muiron, ingénieur-manufacturier à Reims, changèrent la situation. Mettant à profit une invention antérieure de Taylor, qui donnait, par la décomposition ignée des huiles, un gaz trois ou quatre fois plus éclairant, à volume égal, que le gaz de la houille, Houzeau-Muiron rendit cette préparation économique en extrayant la matière grasse des eaux savonneuses, rejetées d’ordinaire après le lavage des laines ; d’un autre côté, le même inventeur parvint à transporter le gaz nouveau, sans compression, dans d’immenses sacs cylindriques en toile imperméable (d’une contenance de 25,000 litres) qui, flexibles comme des soufflets entre deux disques en bois, étaient facilement