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principales joint stock banks de nos voisins, ce sont même les banques de New-York, qui ne peuvent avoir, comme on l’a vu, de billets au porteur en circulation qu’à la condition d’en avoir la représentation en fonds publics. Et pourquoi en est-il ainsi partout ? Parce qu’il y a dans cette réserve en fonds publics une garantie supplémentaire qui a son utilité. Il n’est pas indifférent, quand on voit la Banque de France, avec 200 millions d’espèces seulement pour répondre de 800 millions de billets et de 200 millions de dépôts, de savoir qu’en dehors de son portefeuille elle a encore en réserve une certaine somme de rentes ; cela ajoute à son crédit, et comme ce crédit est en définitive la clé de voûte de tout l’édifice, celui auquel on s’adresse en dernier ressort dans les temps de crise, il faut se garder de l’affaiblir, surtout pour arriver à des résultats aussi stériles que si l’on s’imaginait de faire hausser le niveau d’un fleuve en y versant une goutte d’eau. Les 150 millions de rentes que possède aujourd’hui la Banque, rendus à la circulation disponible, non-seulement de la France, mais de toute l’Europe, y produiraient, pour l’abaissement du taux de l’intérêt, le même effet que la goutte d’eau. Cherchons donc ailleurs un moyen plus efficace.


II

Nous avons en France un stock métallique qu’on évalue à 6 ou 7 milliards, c’est beaucoup trop assurément, et si un pays comme l’Angleterre, qui fait infiniment plus d’affaires que nous, peut s’arranger d’un stock métallique d’environ 1,500 millions, il n’y a pas de raison pour que nous en restions à ce stock de 6 ou 7 milliards. Les métaux précieux sont comme les routes, on les possède à titre onéreux : il faut avoir tous ceux qui sont nécessaires ; mais il ne faut pas en avoir plus, car de même que les routes sont du terrain enlevé à l’agriculture, de même les métaux précieux pourraient être échangés utilement contre d’autres marchandises qui viendraient augmenter la richesse du pays. La science financière doit donc chercher, non pas à les supprimer (on ne les supprimera pas plus qu’on ne peut supprimer les routes), mais à les économiser par le perfectionnement du crédit. En Angleterre, en Amérique, dans tous les pays où l’on apprécie l’importance du capital, aussitôt qu’une épargne est formée, elle est déposée dans une banque qui se chargé de la faire valoir, qui vous ouvre un crédit proportionnel, et comme elle se charge aussi de vos paiemens, on n’a pas besoin de garder chez soi d’argent improductif. En France, nous sommes tous plus ou moins notre propre banquier ;