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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 janvier 1864.

Après le vote de l’adresse, à la fin de la dix-septième séance consacrée par le corps législatif à cette manifestation vivace du régime représentatif en France, M. de Morny, qui a montré dans la direction de ces vastes débats un tact et un esprit de conciliation appréciés de tous, n’a pas voulu quitter le fauteuil sans exprimer l’orgueil qu’il ressent à présider une chambre où l’éloquence politique vient de s’élever à une si grande hauteur. En parlant ainsi, M. de Morny n’a fait que traduire avec une heureuse justesse un sentiment partagé, à l’heure présente, par tout ce qu’il y a en France d’esprits éclairés, libéraux et généreux. Que le temps nous apporte avec maturité les conséquences naturelles de cette renaissance de la vie publique ; que l’on s’applique bientôt à pressentir les développemens que ce beau début promet à l’expansion libérale de notre pays, aujourd’hui il faut avant tout donner place à l’émotion unanime que laissent parmi nous les délibérations du corps législatif, animé d’une nouvelle vie par les dernières élections. Nous ne sommes pas de ceux dont le patriotisme, se battant continuellement les flancs, s’imagine que la France a besoin de se décerner à elle-même à tout bout de champ de creuses et fades adulations. Nous croyons cependant que, sans céder à la fausse gloire, il nous est permis d’être fiers du spectacle auquel nous venons d’assister. Le sentiment simple et viril que les discussions du corps législatif ont inspiré aux amis de la liberté et de la dignité française est un sentiment de satisfaction cordiale. Il semble qu’un souffle plus sain et plus puissant ait respiré tout à coup dans nos poitrines dilatées. Nous venons d’éprouver quelque chose comme la révélation subite d’une force latente que quelques-uns croyaient éteinte. C’est un réveil ; nous nous sommes tâtés, nous nous retrouvons. La discussion, des affaires publiques, la revendication des droits des citoyens, l’appréciation des intérêts généraux de notre pays et de la direction de sa politique dans le monde, ces privilèges, ces droits, pour tout dire, ce patrimoine dont la révolution de 1789 a voulu doter