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plusieurs y voient une grande race égale en importance à nos trois divisions primaires de l’humanité[1]. Un petit nombre seulement ont compris que la race malaise n’était en réalité qu’une race mixte ; mais ils semblent lui attribuer une homogénéité qui certainement n’existe pas. Le caractère général de ces populations est au contraire une hétérogénéité extrême, et dans leur variété même l’on trouve, pour la question qui nous occupe, des enseignemens précieux. Pour mettre hors de doute ces deux propositions, il faudrait, comme je l’ai fait ailleurs[2], comme je le ferai peut-être un jour dans la Revue, ne pas craindre de multiplier les détails. Aujourd’hui je me borne à résumer rapidement les résultats généraux de cette étude.

Lorsqu’on pénètre quelque peu avant dans l’examen des races du sud-est de l’Asie, on voit les trois éléments anthropologiques fondamentaux, — le nègre, le jaune et le blanc, — arriver jusqu’aux confins du continent, et se montrer parfois d’une manière erratique à l’état de pureté plus ou moins complète, soit sur la terre ferme, soit dans quelques-uns des archipels qui en sont pour ainsi dire le prolongement. Partout d’ailleurs, dans cette région insulaire, on rencontre les traces du mélange des trois éléments. En général, le type nègre a la plus faible part, et ne fait guère que laisser sa trace dans les populations[3]. Le type jaune et le type blanc se partagent la suprématie, et de là résultent deux grands groupes auxquels on peut donner la rang de familles dans la classification. Le premier de ces groupes constitue la famille malaisienne, le second la famille polynésienne.

La famille malaisienne se partage elle-même en deux groupes, dont l’un, placé à l’occident, comprend les Hovas et quelques autres tribus de Madagascar, dont l’autre, placé à l’orient, domine dans tous les grands archipels indiens, en y comprenant les Philippines, et dans la presqu’île de Malacca. Ce dernier est le véritable noyau de la race dont les Hovas et leurs dérivés ne sont qu’une colonie ; mais lui-même est loin d’être homogène, et pour se reconnaître au milieu du fouillis de populations qui le composent, il est nécessaire de prendre un type qui résume en quelque sorte l’ensemble des

  1. Blumenbach en particulier partage l’espèce humaine en cinq races principales, et la race malaise est la cinquième dans sa classification.
  2. Dans le cours que j’ai fait au Muséum en 1862. Cette étude a reposé principalement sur l’examen d’une très belle série de tête osseuses faisant partie de nos collections anthropologiques, et dont le Muséum doit le plus grand nombre à M. Vrolik, l’éminent naturaliste que la Hollande vient de perdre. Cette origine en garantit l’authenticité.
  3. Il va sans dire que je ne parle pas ici des tribus mélanaisiennes encore à l’état de pureté plus ou moins complète qu’on rencontre au centre de certaines îles dont la plus grande partie est occupée par les races mixtes. C’est de ces dernières seules qu’il est ici question.