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il faut passer à l’examen de détail, qui était assez laborieux en 1854, et qui est devenu plus facile en 1863. Le budget russe présentait jusqu’à ces derniers temps une terre inconnue, dont l’accès était interdit aux profanes. Ce fut une grande réforme, regardée comme un acte d’audace, que la publication, même incomplète et fautive, des états de recettes et de dépenses faite pour l’année 1862 par M. Kniajevitz, alors ministre des finances. Un travail plus exact a été préparé pour l’exercice 1863 par le ministre actuel, M. de Reutern. Il y a cependant entre ces deux documens un curieux point de similitude : les deux budgets se soldent par un déficit à peu près égal. Le chiffre avoué pour 1S62 est de 14,757,899 roubles, et cinq séries de 3 millions de bons du trésor viennent combler pour 1863 un déficit pareil, qui atteint le nombre plein de 15 millions de roubles (60 millions de francs).

Au mois de mai 1863, M. de Reutern, ministre des finances, présentait au tsar le rapport sur le budget de l’empire pour l’exercice 1863. Il suffit de l’interroger pour se convaincre combien les états dressés antérieurement étaient fautifs. Non-seulement un classement arbitraire défiait tout contrôle sérieux, mais des revenus nombreux, d’une nature analogue à celle des revenus généraux de l’état, entraient dans d’autres caisses que celles du trésor, et se trouvaient dépensés sans que le ministre en eût connaissance. Une commission spéciale a été chargée de poser des règles plus efficaces, et, par un décret impérial du 22 mai 1862, on s’est appliqué à introduire quelque ordre au milieu de ce chaos. Chaque administration a été appelée non-seulement à changer toute l’économie de ses évaluations, mais encore à introduire dans son budget une masse de recettes et de dépensés qui n’y figuraient pas antérieurement. On a porté dans les budgets séparés tous les revenus de l’état, c’est-à-dire tous ceux qui antérieurement entraient dans les caisses du trésor et étaient inscrits dans le budget, ainsi que ceux qui étaient perçus par d’autres administrations, qui les dépensaient sans allocation budgétaire. D’un autre côté, on a porté aussi au budget les dépenses qui antérieurement étaient imputables sur ces revenus spéciaux. Cette déclaration explique suffisamment l’élévation subite du chiffre des recettes et des dépenses : pour la première fois, le budget présente le tableau complet des recettes et des dépenses de l’empire ; on y a porté pour 42,700,000 roubles (plus de 170 millions de francs) de revenus qui n’y figuraient pas antérieurement, et on y a inscrit pour 37,800,000 roubles (environ 150 millions de francs) de dépenses correspondantes. Un premier résultat de la concentration des services a donc été une augmentation de produit net au profit du trésor qui égale presque 20 millions de francs.