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également invoqués par Duplessis au sujet de l’accusation dirigée contre la duchesse de Vivonne, mais moins appuyée de preuves, d’avoir fait sacrifier un enfant, conjointement avec la duchesse d’Angoulême et Mme de Vitry, pour la mort du roi, et plus tard, l’enchantement n’ayant pas réussi, pour obtenir ses bonnes grâces et l’éloigneraient de Mme de Montespan.

Tels étaient les principaux moyens de Duplessis pour effacer l’impression défavorable des dépositions contre les deux grandes dames qu’il s’agissait alors de dégager du procès. Tout porte à croire que Colbert communiqua ces mémoires à Louis XIV. De son côté, La Reynie adressait, le 17 avril 1681, à Louvois un mémoire également destiné au roi, où on lit : « La décharge que la Filastre a faite par sa déclaration à l’égard de Mme de Montespan s’applique uniquement au dessein prétendu de l’empoisonnement de Mme de Fontanges. Il y a deux autres faits (celui d’une messe sacrilège et celui de poudres pour le roi) où Mme de Montespan a été nommée, et les charges sur ces deux faits ont encore été de nouveau confirmées, la Filastre n’ayant rétracté que le premier… » On se figure l’embarras de Louis XIV au milieu de ces affirmations contradictoires. Il y avait là évidemment deux opinions qui se combattaient : l’une, s’inspirant de Colbert, devenu l’allié de Mmes de Vivonne et de Montespan, voulait la fin du procès et craignait avant tout le scandale ; l’autre, que représentait La Reynie et qui semblait prendre le mot de Louvois, attribuait à Mme de Montespan, soit directement, soit par la demoiselle Désœillets, ou par une autre de ses femmes nommée Catau, des pratiques avec les principaux accusés. Cependant le défenseur de Mmes de Vivonne et de Montespan ne paraissait pas lui-même bien convaincu de leur complète innocence. Voici ce qu’il écrivait confidentiellement à Colbert, le 26 février 1681, en lui envoyant un second mémoire : « Ayez la bonté de voir l’observation générale qui est au commencement, parce qu’elle peut fournir des moyens contre beaucoup de choses qui paraissent assez prouvées. »

Il était pourtant devenu indispensable de prendre un parti et d’en finir. Répondant aux questions de Colbert, Duplessis reconnut que la procédure avait été régulière, et que la multiplicité des interrogatoires ne pouvait être un objet de nullité, les juges ayant le droit d’en faire autant qu’ils le croyaient nécessaire. La longueur de l’instruction était à la vérité contraire à l’esprit de l’ordonnance de 1669 ; mais, celle-ci ne fixant pas de délai, il n’y avait pas là non plus matière à nullité. Sans doute encore l’on avait eu le tort de confier le jugement à une chambre extraordinaire ; rien pourtant ne le défendait. Le plus grand inconvénient de la durée de l’affaire était la facilité