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lui-même à l’exécution de la grande œuvre de bienfaisance qu’il avait rêvée. De vaste3 landes furent acquises bu concédées dans l’Over-Yssel et dans la Drenthe, et des contrats conclus avec des communes, des associations ou des particuliers qui, moyennant une certaine rétribution, avaient le droit d’envoyer Un indigent à la colonie, où il obtenait la jouissance d’une maison, d’un jardin et de 2,50 hectares de terre. Le colon, qui recevait aussi des instrumens aratoires et une vache, travaillait d’abord sous la surveillance et pour le compte de l’association ; mais, parvenait-il à épargner le petit capital nécessaire à son exploitation, il devenait locataire indépendant (vryboer).

Ce plan si bien conçu a-t-il réussi ? On voudrait pouvoir répondre affirmativement, car le moyen serait trouvé de combattre efficacement la misère dans tous les pays qui ont encore des terres vagues à défricher. Certes l’œuvre de la Société de bienfaisance n’a pas été vaine. Grâce au dévouement des administrateurs et à la générosité des souscripteurs, des résultats sérieux ont été obtenus : 434 petites fermes ont été bâties, 1,400 hectares de terre mis en culture ; des églises, des écoles, six fabriques de cotonnades successivement construites, et une population laborieuse de 2,500 à 3,000 personnes a été entretenue, moralisée, sauvée de la misère. Ce sont là sans doute des résultats admirables ; malheureusement les dépenses ont été énormes, le déficit est allé croissant, et l’œuvre, au lieu de s’étendre, a décliné. D’abord on a séparé et avec raison les colonies pour la répression de la mendicité, Veenhuyzen et Ommerschans, de celles de Frederiksoord ; ensuite il a fallu vendre une partie de la propriété, et comme le zèle des souscripteurs s’est refroidi, la situation de la société est devenue dans ces dernières années extrêmement critique. Cependant, grâce aux excellentes réformes introduites récemment, les recettes allaient balancer les dépenses, quand la cherté inattendue du coton est venue tarir la source des bénéfices que procuraient les fabriques[1]. L’administration actuelle a donc à lutter encore, mais il faut espérer qu’elle sera soutenue par le concours du pays tout entier, et que la nation hollandaise ne laissera point succomber une admirable institution

  1. La commission de la société, composée d’hommes compétens et présidée par un agronome distingué, M. O. van Andringa de Kempenaer, a nettement dévoilé les causes de cette fâcheuse situation ; elle a montré que l’on avait trop négligé de faire appel aux efforts individuels des colons, et qu’il était impossible de faire vivre 2,500 personnes sur 1,200 hectares de terres sablonneuses nouvellement défrichées. Elle propose comme remède la création de plusieurs grandes fermes, et le jeune et intelligent directeur de la colonie, M. Jongkindt Coninck, m’a affirmé qu’avec ce système la colonie pourrait marcher et se développer.