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voit un tilleul de vingt pieds de circonférence, qui donnerait l’idée la plus favorable de la qualité du fonds. Il couvre tout le vaste bâtiment de l’auberge près de laquelle il est planté, et un important marché de moutons se tient à l’ombre de ses rameaux. On n’obtient du reste cette croissance des arbres que par des soins inconnus ailleurs ; ce sont surtout les taillis de chênes qui sont admirablement traités, et qui donnent aussi en échange les plus beaux résultats. D’abord, avant de planter les jeunes souches, on défonce le terrain à un mètre de profondeur, et on le cultive pendant deux ans en le fumant copieusement. Quand le taillis est constitué, on supprime tous les arbrisseaux étrangers comme on sarcle un champ de betteraves ; l’année qui précède la coupe, on enlève toutes les petites branches des grandes pousses afin que l’ouvrier puisse mieux détacher l’écorce destinée aux tanneurs, et on arrive à écorcer ainsi de très menus rameaux qui ne servent partout ailleurs que de bois à brûler. La coupe a lieu tous les huit ou neuf ans. Aussitôt qu’elle est faite, on retourne tout le terrain à la bêche entre les troncs, on enterre le détritus des feuilles, on repeuple les endroits vides, on jette les souches vieillies, et on obtient par cet entretien minutieux une croissance vraiment extraordinaire et un produit qui ne l’est pas moins. Un taillis traité de cette manière se vend 600 ou 700 fr. l’hectare, ce qui fait un revenu annuel de 60 à 80 francs[1].

Les bois occupent une notable partie du territoire de la Veluwe, car dans la province de Gueldre, où ce district est compris, ils occupent 69,000 hectares, et ils se rencontrent principalement dans cette région sablonneuse et dans le comté de Zutphen, qui en est le prolongement. Dans la Veluwe même, il y a vingt ans, on comptait 7,000 hectares de haute futaie, 5,000 de sapins, 13,000 de taillis, en tout 25,000 hectares. On estime que depuis trente ans on a créé plus de 10,000 hectares de bois de chênes et de sapins, ce qui fait un capital de 15 à 20 millions ajouté à la fortune publique.

Fertiliser la lande par la culture est plus difficile que de la mettre en valeur par des plantations, car pour réussir il faut beaucoup plus de travail, plus de constans efforts et plus d’avances. Aussi le progrès s’est-il fait lentement, plutôt par l’infatigable labeur de la petite culture que par les sacrifices de riches propriétaires. Les origines d’une ville née récemment aux bords de la Gironde ont trouvé en France d’ingénieux historiens[2]. M. Sloet tot Oldhuis, dans un

  1. Depuis quelques années, on s’occupe de plus en plus de la plantation du pin sylvestre. On estime que les dépenses de plantation d’un hectare de sapins montent à 180 francs, dont 86 francs pour défoncer le sol à 60 centimètres de profondeur, 54 fr. pour 10,000 plants de trois ans, et 40 francs de main-d’œuvre pour les déplanter.
  2. M. Reclus dans la Revue du 1er novembre 1863 et M. Pelletan dans un livre intitulé la Naissance d’une ville.