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encore, c’est qu’au plus fort du coup de vent du 1er octobre, le Solferino, dont la machine était réduite à l’impuissance par suite des avaries survenues dans son tuyautage, tint la cape à la voile seulement depuis neuf heures et demie du matin jusqu’à une heure après midi. On avait si peu compté sur la possibilité d’une pareille prouesse, que le Solferino n’était même pas pourvu des voiles avec lesquelles on tient ordinairement, la cape : ce fut seulement après qu’il fut rentré à Brest que l’on s’occupa de lui préparer un jeu de voiles pour ce cas particulier.

Il n’est pas besoin d’insister : aussi ne citerai-je qu’un seul des tableaux où sont constatées les vitesses obtenues à la voile, et au plus près du lit du vent. L’ordre ayant été donné de chasser en avant et en route libre, les navires se sont ainsi classés :


Napoléon 8 nœuds 3 par heure
Tourville 7 « 4 «
Magenta 7 « 2 «
Couronne 7 « 1 «
Solferino 7 « «
Normandie 6 « «
Invincible 6 « «

Si l’on considère les différences de déplacement, c’est-à-dire des poids à traîner, et des surfaces de voilure, c’est-à-dire des moyens de propulsion, ces résultats sont plus que satisfaisans.

Comme le succès rend ambitieux, on comprendra aisément la vivacité avec laquelle les marins se rallient à l’idée d’augmenter les dimensions des mâts et des voiles sur les bâtimens cuirassés. D’un côté, c’est augmenter les moyens de sécurité, de vitesse et de liberté de mouvement, c’est reconquérir au moins en partie des avantages que l’on croyait perdus. De l’autre côté, c’est développer dans une proportion difficile à estimer le rayon d’action, la portée des nouveaux navires. Tout cela est vrai, mais il est une limite que la question militaire ne permet de franchir à aucun prix. On connaît la dangereuse propriété que possède l’hélice d’attirer sur elle tout ce qui flotte le long du bord d’un navire et la facilité avec laquelle des objets peu volumineux, ou peu consistans et peu lourds, précisément même parce qu’ils sont ainsi, parviennent à paralyser cette source de la propulsion lorsqu’ils s’engagent dans ses organes. Par suite, le navire de guerre à hélice doit, avant de se battre, pouvoir en quelques minutes amener sur le pont sa mâture et tout ce qui en dépend. Par suite encore, il faut de toute nécessité que cette mâture et son gréement soient très simples, très faciles à démonter et à remettre en place. Il y a là une mesure à observer, et à cette occasion qu’il me soit permis de recommander à