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et qu’ils auraient pu les réparer à la mer au premier retour du beau temps. Au contraire les navires en bois, qui avaient dû laisser porter, c’est-à-dire qui avaient dû renoncer plus tôt qu’eux a la lutte contre le coup de vent, avaient fait des avaries qui leur étaient particulières ; ils étaient forcés de rentrer non-seulement en rade, mais même au port et au bassin, et ils allaient retenir la division immobile pendant dix-sept jours, lorsque les autres, même en admettant qu’ils aient trouvé grand bénéfice à rentrer en rade, auraient pu repartir après le temps nécessaire pour compléter leur charbon, ce qui malheureusement n’est pas encore très facile en rade de Brest par le mauvais temps.

C’étaient déjà des résultats d’importance majeure ; mais le reste de la campagne allait montrer que nos navires cuirassés possèdent encore beaucoup d’autres qualités que les chances de cette première sortie avaient déjà fait soupçonner, sans permettre de les constater. Le temps favorisa singulièrement cette seconde partie de la campagne ; il fut toujours assez beau pour que l’on ait pu procéder à toutes les études qui entraient dans le programme de la commission ; il fût assez varié, soit comme force et direction des vents, soit comme état de la mer, pour qu’on ait pu expérimenter sérieusement toutes les combinaisons ; le voyage enfin fut assez long comme durée (trente-cinq jours) et comme parcours (douze cents lieues environ de Brest à Cherbourg en touchant à Madère et aux Canaries) pour que l’on soit autorisé à regarder les résultats obtenus comme des résultats pratiques. Nous allons signaler les plus importans.

D’abord il faut écarter le reproche que l’on faisait à nos navires cuirassés de manquer de hauteur de batterie et d’être sous ce rapport inférieurs à leurs devanciers. Les chiffres que nous avons cités plus haut répondent d’avance à l’objection ; ils établissent en effet que les hauteurs de batterie en charge étant pour


Le Napoléon 1m,80
Le Tourville 1m,81

elles sont pour les bâtimens cuirassés

Normandie 1m,82
Invincible 1m,82
Couronne 1m,98
Solferino 1m,82
Magenta 1m,82

Et avec ces chiffres ils portent 650 et 700 tonneaux de charbon, dont la consommation les fait émerger de 60 à 70 centimètres. Ils n’ont donc rien à envier à leurs prédécesseurs. Sans doute, si l’on pouvait, sans faire tort aux autres qualités du navire, augmenter encore cette dimension, cela ne vaudrait que mieux ; mais c’est un