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mois d’échéance, souvent moins ; ensuite la puissance de l’épargne est telle que le retrait du dépôt, lorsqu’il a lieu, se trouve bien vite compensé par un dépôt nouveau. Il suffit à la banque d’avoir, soit en caisse, soit en compte courant à la banque principale, à celle d’Angleterre ou à celle de France selon les pays, une somme disponible assez légère pour faire face aux éventualités. En temps de crise, la question se complique ; les dépôts ne compensent plus les retraits, et les banques sont obligées d’user de toutes leurs ressources pour faire face aux demandes de remboursement. Si elles ont fait un bon emploi des capitaux qui leur ont été remis, si elles ne se sont pas engagées au-delà d’une certaine mesure, si enfin elles inspirent confiance, elles réussissent à se tirer d’embarras ; mais toujours est-il que ces momens-là sont critiques pour les banques de dépôt, et on peut même dire qu’en Amérique et en Angleterre, depuis que les dépôts ont pris un développement si considérable, les crises n’ont pas d’autre cause que la variation de ces mêmes dépôts. Est-ce à dire que le péril soit sans remède ? Nous croyons au contraire qu’il est possible de le conjurer en grande partie. On pourrait, comme cela se fait déjà en Angleterre, exiger un certain délai pour les retraits de quelques dépôts en bonifiant un intérêt plus élevé à ceux qui se soumettraient à cette condition, de telle façon que, l’échéance du portefeuille coïncidant avec l’exigibilité de ces dépôts, on fût à l’abri de ce côté. Resteraient les dépôts en comptes courans qu’on a le droit de retirer par des mandats payables au porteur ou à deux ou trois jours de vue : il est évident qu’il y a là une part de danger inévitable, car la banque ne peut pas bonifier un intérêt au déposant et garder le dépôt intact dans sa caisse ; mais cette part de danger, c’est celle qui accompagne tous les actes de l’humanité, surtout les actes commerciaux. Certes, en gardant dans notre coffre-fort les épargnes que nous pouvons faire, nous les exposons moins, et lorsque la crise arrive, elle est moins forte qu’elle ne le serait avec une conduite différente. C’est ce qui a eu lieu en 1857 ; on a attribué l’attitude assez calme que nous avons eue à cette époque à côté des perturbations énormes que la crise causait en Angleterre, aux États-Unis et à Hambourg, on a attribué cette attitude à la fermeté de notre crédit ; il eût été plus juste de l’attribuer à l’infériorité de notre crédit. Aussi qu’arrive-t-il ? C’est qu’au bout de très peu de temps, grâce à l’énergie des moyens de crédit, les pertes sont réparées dans les pays dont nous parlons, tandis que chez nous la moindre secousse rend notre commerce languissant pendant plusieurs années. Les chemins de fer aussi ont leurs dangers ; à tout moment, nous sommes émus par le récit d’un accident terrible arrivé dans l’emploi de ce moyen de locomotion.