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le duché de Slesvig. Ils avaient aliéné peu de temps après (1758), en échange d’une bonne somme d’argent, leurs principautés héréditaires entre les mains des rois de Danemark, et, n’observant même plus les obligations féodales, ils avaient vécu pendant plusieurs générations en riches propriétaires oublieux de toutes prétentions. Cependant vers la fin du XVIIIe siècle, le grand-père du prétendant actuel ayant épousé une sœur du roi Frédéric VI, cette alliance, qui les rapprochait du trône, excita leur ambition ; ils portèrent tout d’abord leurs vues sur la couronne danoise pour les abaisser ensuite à la simple domination d’un état imaginaire de Slesvig-Holstein. Le duc Christian d’Augustenbourg, après avoir contribué pour sa bonne part à la guerre entre le Danemark et les duchés de 1848 à 1850, fut exilé lors du rétablissement de la paix et de la signature du traité de Londres. Son frère et lui furent dépouillés des ordres et dignités qu’ils avaient obtenus. Toutefois, à cause de leur parenté avec la famille royale, leurs propriétés ne furent pas confisquées ; celles du duc furent, il est vrai, retenues par le gouvernement danois, mais en échange, cette fois encore, d’une somme très considérable, qui constituait une avantageuse compensation. Le duc Christian souscrivit alors, sous la date du 30 décembre 1852, un acte de renonciation qu’il est très intéressant de rappeler dans les circonstances présentes. Le texte même de cet acte respire un parfum de féodalité mourante qu’il n’est pas inutile de faire revivre comme une preuve nouvelle de cette vérité, qu’il y a au fond des tristes débats de l’Allemagne contemporaine une cause efficace de trouble et de malaise qui n’est autre que la transition inévitable de l’ancien état féodal, çà et là subsistant, aux formes et à l’esprit de la civilisation moderne :


« Nous cédons et transmettons à sa majesté le roi de Danemark et à ses héritiers, pour nous, nos héritiers et nos descendans, tous les droits qui nous reviennent sur les terres et propriétés ducales des Augustenbourg, avec leurs dépendances, avec tous les châteaux, palais et édifices qui se trouvent sur ces terres, avec tout ce qui, sur ces terres, tient au sol, aux murs, à fer et à clou, notamment aussi avec le total de l’inventaire du bétail et matériel de labour et d’exploitation, ainsi qu’avec toutes les immunités et privilèges concernant ces terres ou les gens qui en font partie, que ces droits et privilèges soient fondés sur des contrats ou sur la tradition. »


Le duc d’Augustenbourg s’engageait ensuite, lui et sa famille, à établir désormais son séjour en dehors de la monarchie danoise. Il faisait vœu et promettait, sur sa parole et sur son honneur de duc, pour lui et sa famille, de ne rien entreprendre qui pût troubler ou mettre en péril la tranquillité dans les états du roi, et aussi de ne