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un nouveau projet de travaux accompagné d’un mémoire des plus intéressans sur l’hydrographie générale du bassin d’Arcachon. D’après ce plan, il s’agirait, non pas de modifier le régime de la passe, mais au contraire de la maintenir telle qu’elle existe aujourd’hui en fixant d’une manière définitive les rivages de l’entrée. Une digue partant de la pointe de Moullo, au sud d’Arcachon, longerait la rive orientale sur une longueur de 5,300 mètres, puis, se détachant du bord par une gracieuse courbe, s’avancerait à plus de 3 kilomètres en mer, de manière à former une rive de pierre au grand courant du chenal. Une deuxième jetée, enracinée à l’extrémité du cap Ferret et protégée à son origine par des épis d’ensablement pareils à ceux de la Pointe-de-Grave, continuerait au sud la péninsule du cap, et réduirait l’entrée du bassin à 2 kilomètres de largeur. L’ensemble des travaux projetés offre un développement total d’environ 11 kilomètres de digues. On le voit, la tâche des ingénieurs est formidable, et ce qui l’aggrave encore, c’est que la pierre manque à Arcachon et qu’il faudra nécessairement importer des carrières de Bretagne tous les blocs destinés aux enrochemens. Et pourtant, lorsque les travaux seront achevés, la partie du chenal qui se dirige vers le nord-ouest, et dans laquelle ont lieu tous les sinistres, ne sera même pas comprise entre les jetées ; sur une longueur de près de 5 kilomètres, elle restera exposée à tous les changemens imprévus que peut lui faire subir l’action des vents et des courans. Là commence le domaine de l’inconnu, car les oscillations des barres dépendent d’une foule de circonstances qui n’ont pas encore été soumises au calcul. Toutefois il est permis d’espérer que, grâce à la suppression des petites passes et à la disposition des jetées contenant toute la masse des eaux de marée, le chenal s’ouvrirait directement à l’ouest, dans le sens le plus favorable à l’entrée des navires qui viennent de la haute mer.

Présenté il y a déjà huit années, le projet de M. Pairier devrait être modifié dans quelques détails. Depuis 1855, la rive orientale de l’entrée a été emportée sur une-largeur considérable, le banc de Matoc s’est changé en îlot, d’autres bancs se sont formés ou déplacés ; mais la direction du chenal est restée sensiblement la même, et par conséquent le plan général des travaux est encore applicable : on est arrêté seulement par l’importance des sommes nécessaires. Le devis approximatif est fixé à 11 millions de francs ; mais après les dépenses prévues viennent souvent les dépenses imprévues : les rivages peuvent s’ébouler, le régime des courans et des passes peut se modifier brusquement, les tempêtes peuvent emporter les épis ou renverser les digues, et si le bassin d’Arcachon doit offrir en temps de guerre un refuge assuré à tous les navires, ne doit-il