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LA
SCIENCE IDÉALE
ET
LA SCIENCE POSITIVE





À M. ERNEST RENAN.


Votre exposition du système ou plutôt de l’histoire du monde, telle que vous l’entendez, a dû exciter, j’en suis sûr, l’étonnement de bien des gens. Les uns n’admettent point qu’il soit permis de traiter de pareilles questions, parce qu’ils ont à priori des solutions complètes sur l’origine et sur la fin de toutes choses. Les autres au contraire ne conçoivent même pas que l’on puisse les aborder à aucun point de vue d’une manière sérieuse et parvenir à des solutions qui aient le moindre degré de probabilité. Ils rejettent complètement les expositions de ce genre et les regardent comme étrangères au domaine scientifique. En fait, la légitimité et surtout la certitude de semblables conceptions peuvent toujours être controversées, parce que les données positives d’un ordre général et impersonnel et les aperçus poétiques d’un ordre particulier et individuel concourent à en former la trame.

C’est des premières données que les systèmes de cette nature tirent leur force ou plutôt leur degré de vraisemblance ; c’est par les autres qu’ils prêtent le flanc et sont exposés à être traités de pures chimères. Mais si l’on n’accepte le mélange de ces deux élémens, tout système régulier, toute conception d’ensemble de la na-