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où nous serons à même d’étudier de près le caractère des fouilles et la série des travaux métallurgiques.

Cette mine, aujourd’hui l’une des plus florissantes et qui donne à ses actionnaires un million net de livres sterling, avait été regardée pendant un temps comme épuisée. Tout le monde en désespérait, et les actions étaient tombées à rien, lorsqu’on eut le bonheur de trouver une veine d’une richesse extraordinaire. Ces vicissitudes ne sont point rares dans la fortune des mines ; celle de Botallack avait pareillement été abandonnée. On rencontre encore d’autres alternatives curieuses. La mine de Dolcoath avait été pendant un temps extrêmement riche en cuivre : elle ne donne plus aujourd’hui que de l’étain ; il est vrai que les travaux se développaient alors dans la roche ardoisière, tandis qu’ils pénètrent maintenant dans le granit. Percer le granit était regardé autrefois comme une entreprise impossible, ou tout au moins improductive ; mais à présent l’art des mineurs ne connaît plus d’obstacles. Les travaux sont situés tout près de la ville dans une contrée triste et découverte ; on croit qu’il y avait anciennement des arbres, peut-être même des forêts, mais que ces arbres et ces forêts ont été brûlés pour fondre le métal dans un temps où l’on ne faisait point usage du charbon de terre. Je fus d’abord introduit dans la chambre où le comité tient ses séances, committee room. Presque toutes les mines de cuivre et d’étain appartiennent à des compagnies. Quand quelques individus croient avoir trouvé du minerai dans un terrain et qu’ils réussissent à faire partager aux autres leur conviction, ils forment généralement une société qui lance, alors des actions pour réaliser un capital. Ces actions sont soumises, surtout dans les commencemens, à toutes les vicissitudes du marché. Celles des great Devon Consols, grandes mines du Devonshire, qui servent depuis plusieurs années d’énormes dividendes[1], avaient été fort dépréciées à l’origine : personne n’en voulait. Je connais aussi un habitant de la Cornouaille qui aurait pu faire une fortune, s’il eût seulement voulu donner son nom à une société qui lui offrait en échange des morceaux de papier ayant aujourd’hui une valeur de plusieurs milliers de livres sterling. Ces transactions ont tout le caractère d’un jeu et d’une loterie ; les uns y recueillent l’opulence, les autres la ruine. Le marché des actions de mines présente en Cornouaille les fluctuations les plus étranges, et il n’est pas très rare de voir ces valeurs varier de 200 et même 300 pour 100 en une semaine. Souvent, quand une mine baisse, les chefs de l’entreprise, qui ont intérêt à se débarrasser de leurs actions, essaient de faire croire à une prospérité factice. Les

  1. On les appelle dans le Devonshire les lionnes des mines à cause de la grandeur et de la puissance des travaux. Elles sont situées à deux ou trois milles de Tavistock, sur la lisière des moors ou terres vagues et incultes.