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suffit pour que l’eau s’évapore au bout de quelques mois. On coupe alors l’argile blanche avec un couteau ou avec la bêche, et on la transporte dans des maisons de bois bien ouvertes pour la faire sécher ; elle se durcit en moellons et forme la matière avec laquelle se pétrit la porcelaine.

Jusqu’au milieu du dernier siècle ; l’art de faire de la porcelaine était à peu près inconnu en Angleterre. On manquait pour cela d’une terre blanche, le kaolin, qu’on avait crue longtemps particulière à la Chine. En 1745, un aventurier rapporta de la Virginie cette même substance, qui, à cause de la rareté du fait, se vendit alors 13 livres sterling la tonne. Dix ans après, un quaker de Plymouth, William Cookworthy, s’associait avec lord Camelford pour exploiter de concert sur les propriétés de ce dernier, à Saint-Stephen, ’une veine d’argile blanche connue depuis sous le nom de kaolin de la Cornouaille. L’expérience ayant réussi, il établit à Plymouth une manufacture de porcelaine qui fut ensuite transférée à Bristol. Cookworthy avait ainsi jeté les fondemens d’une industrie qui ne tarda point à se développer. Aujourd’hui ces travaux d’argile (clay works) sont très répandus dans certaines parties de la Cornouaille, et surtout aux environs de Saint-Austel. La matière première des fabriques se présente à l’état de nature sous deux formes bien distinctes : china clay (terre de porcelaine) et china stone (pierre de porcelaine). On a vu comment se recueillait la première, et les procédés varient seulement dans les détails, selon les lieux ou la nature des eaux. Quelques-unes de ces exploitations sont très intéressantes, et emploient un assez grand nombre de personnes, hommes, femmes et enfans. Les femmes ont des chapeaux blancs, des manches blanches, des tabliers blancs, et il est curieux de les voir porter sur les collines environnantes une argile plus blanche encore, qu’elles exposent avec art aux rayons du soleil. La pierre de porcelaine s’obtient au contraire par les moyens employés le plus souvent dans les carrières ; c’est-à-dire en faisant sauter la roche. Quand elle a été taillée, on la charge sur des tombereaux, et on la dirige vers le port le plus voisin, d’où elle est ensuite transportée dans des navires aux manufactures du Straffordshire et du Worcestershire. Plus de 80,000 tonnes sont ainsi exportées tous les ans de la Cornouaille, représentant une valeur de 240,000 livres sterling, et environ sept mille personnes se trouvent employées soit à l’extraction, soit au transport de ce produit. Qu’il se présente sous la forme d’argile ou sous la forme de pierre, le kaolin de la Cornouaille provient dans tous les cas de la décomposition du granit, ou tout au moins du feldspath, qui entre dans la texture du granit. On peut observer à Carclaze les différens états de cette décomposition dans les roches plus ou moins molles, plus ou moins