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Au point où nous en sommes, il est possible de résumer en quelques mots les conditions qu’il reste à remplir pour réaliser la navigation aérienne par les ballons. Rendre l’enveloppe imperméable au gaz, gouverner dans le sens vertical, gouverner dans le sens horizontal, tels sont les trois termes du problème à résoudre. Aujourd’hui le meilleur aérostat ne conserve pas sa puissance ascensionnelle pendant quarante-huit heures, les mouvemens verticaux ne s’opèrent qu’aux dépens du chargement, la translation horizontale-se fait au gré des vents : tel est l’état de la question. C’est dire qu’on est aussi loin de la solution que l’étaient Montgolfier, Charles et les autres aéronautes des premiers jours. Tout est encore à créer. Les travaux de quelques centaines d’inventeurs, prolongés pendant près d’un siècle, n’ont produit aucune amélioration pratique, et cependant au nombre de ces inventeurs on compte quelques-unes des intelligences les plus fermes et les plus vigoureuses de notre époque, par exemple Monge et Meusnier, pour ne citer que ceux qui sont morts. Le problème est-il donc insoluble? Avant de conclure, il reste à examiner un dernier projet qui vient de se produire avec bruit, avec plus de bruit peut-être qu’il ne convient à un projet scientifique.


II

S’élever dans l’atmosphère sans être soulevé par un aérostat, monter et descendre, évoluer en tout sens, lutter contre les vents, traverser l’air avec la vitesse d’un projectile, tel est le but qu’on s’est proposé d’atteindre. « Le ballon est, dit-on, un obstacle à la navigation aérienne, c’est une bouée ou tout au plus un radeau. Une machine attelée à un ballon, c’est le mouvement associé à l’immobilité, c’est le vaisseau amarré dont on déploierait les voiles. Attachez un aigle à un ballon, le roi des airs captif, jouet des vents, traînant son boulet et traîné par lui tour à tour, essaiera en vain de lutter contre le moindre trouble atmosphérique. L’aérostat est devenu un obstacle, ou, pour mieux dire, un point de départ vicieux autour duquel s’égarent la plupart des chercheurs. L’aérostat est, comme l’étymologie l’indique, un corps flottant dans l’atmosphère, comme une vessie gonflée flotterait à la surface de l’eau. A sa place, nous voulons créer l’aéronef, littéralement navire aérien qui sera un appareil nageur s’élevant et se dirigeant par sa propre force. »

On connaît l’hélice; dans le moulin à vent, dans la turbine, dans