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respectés, qu’on laisserait « subsister les relations d’affaires avec les Français et les Anglais. » Or que le traité dont M. le commandant Dupré porte la ratification à la reine soit mis à exécution et observé dans ses principales dispositions, comme nous pouvons l’exiger raisonnablement d’un gouvernement et d’une population à demi civilisés, et la France obtiendra des résultats plus certains et moins coûteux que tous ceux qu’elle pourrait espérer des chances de la guerre. Ce traité permet aux sujets des deux pays d’entrer, de résider, de circuler, de commercer dans l’autre pays, en se conformant à ses lois; ils y jouiront respectivement de tous les privilèges, immunités, avantages, accordés dans ce pays aux sujets de la nation la plus favorisée. Les sujets français auront la faculté de pratiquer ouvertement leur religion. Les missionnaires pourront librement prêcher, enseigner, construire des églises, séminaires, écoles, hôpitaux, où ils le jugeront convenable, en se conformant aux lois. Les Français auront le droit d’acheter, de vendre, de prendre à bail, de mettre en culture et en exploitation des terres, maisons, magasins, dans les états du roi de Madagascar. Les autorités locales n’interviendront pas dans les contestations entre Français ou entre Français et autres sujets chrétiens. Le consul seul en connaîtra. Enfin il est une clause qu’il est bon de signaler plus particulièrement : c’est celle qui assure aide et protection, pour l’accomplissement de leur mission, aux Français qui voyageront dans l’intérêt de la science, tels que géographes, naturalistes, ingénieurs et autres[1]. En retour, le gouvernement de l’empereur s’engage, de son côté, à fournir au roi de Madagascar les instructeurs militaires, les ingénieurs civils, conducteurs de travaux, qui lui seront demandés. De pareilles stipulations ouvrent la voie à des conquêtes pacifiques qui valent mieux, à notre sens, que celles qu’on pourrait attendre du succès de nos armes.

A la suite de la conclusion de ce traité, et en quelque sorte pour lui donner toute son efficacité, une compagnie s’est formée pour mettre en valeur les concessions faites par Radama à M. Lambert. Cette compagnie a pris le titre de Compagnie de Madagascar, foncière, industrielle et commerciale[2]. Constituée avec l’autorisation du roi de Madagascar, elle a pour but l’exploitation des mines, des forêts, des terrains situés sur les côtes et dans l’intérieur. Elle a le privilège exclusif de cette exploitation et la propriété des terres inoccupées qu’elle choisira sur le littoral et dans l’intérieur du pays

  1. Ce traité a été publié dans la Revue maritime et coloniale, août 1863.
  2. Cette compagnie s’est recrutée parmi les hommes les plus éminens du monde financier. M. le baron de Richemond, sénateur, a été nommé par décret impérial gouverneur de la société de Madagascar.