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néralement bien informée, il portait une réponse satisfaisante aux dernières propositions des cours de Vienne et de Berlin. »


Un mois plus tard, tous les doutes sont levés. M. Harris écrit à lord Suffolk le 19 septembre :


« J’ai reçu hier matin un message du comte Finckenstein[1] pour me faire savoir qu’il désirait me parler entre midi et une heure. Quand j’ai été chez lui, il m’a informé que, sa majesté prussienne s’étant entendue avec les cours de Vienne et de Pétersbourg pour renouveler de concert d’anciennes réclamations que les trois cours avaient à faire au sujet de plusieurs parties du royaume de Pologne, leurs ministres respectifs à Varsovie avaient reçu ordre de signifier leurs intentions au roi et à la république, et de remettre une déclaration y relative.

« Il a ajouté que sa majesté prussienne, désirant saisir toute occasion de prouver au roi son amitié et ses égards, lui avait ordonné de ne pas différer un instant de m’informer de cet événement, et de me remettre une copie de la déclaration. Le comte de Finckenstein m’a encore dit que le chargé d’affaires de Prusse à Londres avait reçu l’ordre de prévenir les ministres du roi et de leur communiquer la déclaration.

« Dans le cours de la journée d’hier, M. de Finckenstein a fait demander tous les ministres étrangers et leur a fait connaître l’événement, se servant avec tous, à ce qu’on m’assure, des mêmes expressions sans la moindre variante. »


Quoique près d’un siècle ait passé sur ces événemens, on ne saurait lire sans une sorte de stupeur la réponse de lord Suffolk :


« Ma réponse aux déclarations relatives au démembrement de la Pologne, qui m’ont été remises mercredi dernier par les ministres des trois puissances intéressées, a été conçue en ces termes : « Le roi veut bien supposer que les trois cours sont convaincues de la justice de leurs prétentions respectives, quoique sa majesté n’est (sic) pas informée des motifs de leur conduite. »

«Vous remarquerez que les expressions dont je me suis servi, et qui étaient préférables à un complet silence, ont été étudiées avec le plus grand soin, de façon à ne pouvoir impliquer la moindre disposition favorable à une pareille affaire, dont les résultats sont trop incompatibles avec la morale publique et la bonne foi pour ne pas mériter le blâme de sa majesté, bien qu’elle ne les considère pas comme ayant un intérêt immédiat qui doive motiver son intervention. »


Ainsi le traité signé le 17 février 1772, annoncé par M, Harris dès le 1er mars, n’est porté à la connaissance officielle des gouvernemens étrangers par les parties contractantes qu’au mois de septembre. Sept mois se sont écoulés, pendant lesquels, malgré les

  1. Ministre des affaires étrangères à Berlin.