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ris donne tout à coup à son gouvernement la première nouvelle des projets de partage; voici ce qu’il écrit à lord Suffolk :


« ….. Au moment où j’allais fermer mon paquet, je viens d’apprendre qu’un traité de partage disposant de diverses partiels de la Pologne a été signé à Pétersbourg le 15 du mois dernier[1], et qu’aussitôt que les ratifications auront été signées et échangées entre les cours de Vienne, de Berlin et de Russie, un congrès sera tenu à Varsovie. La poste va partir, et je ne puis aujourd’hui en dire davantage. « 


Le 7 avril il écrit de nouveau :


« J’ai de bonnes raisons de croire que le traité relatif au partage de plusieurs districts polonais est revenu hier ici, de Vienne, avec les ratifications, et qu’avant peu toute l’affaire sera rendue publique. Le roi de Prusse a donné vingt mille écus au comte de Solms, et j’ai peine à croire qu’il ait agi ainsi sans bien savoir ce qu’il faisait. Le département des affaires étrangères est ici fort occupé en ce moment. On expédie courrier sur courrier, probablement pour annoncer la fin de la négociation. J’ai la complète certitude que la cour de Vienne non-seulement a tout caché au cabinet de Versailles, mais encore l’a amusé de demandes propres à lui faire croire qu’elle ne consentirait jamais à un agrandissement territorial de la Prusse. »


La première réponse que nous trouvions à cette communication est datée du 20 juin 1772. Lord Suffolk écrit à M. Harris :


« J’apprends de Varsovie que la consternation causée à la cour par les projets de démembrement est aussi grande qu’on pouvait s’y attendre. L’ambassadeur de Prusse, jusqu’à ces derniers temps, a témoigné la plus grande incrédulité et protesté de sa profonde ignorance de tout traité de partage; maintenant, sans rien avouer positivement, il se montre très affecté de nouvelles reçues de sa cour qu’on suppose relatives à cette affaire. En même temps le ministre d’Autriche à Saint-Pétersbourg prétend être fort mécontent et fort dégoûté des prétentions du roi de Prusse. Il est inutile de chercher à former des conjectures sur cette curieuse affaire. — Jusqu’à quel point les trois cours sont-elles d’accord sur les détails, et que leur reste-t-il à arranger? C’est ce que nous saurons bientôt. — Pour ma part, je ne puis m’empêcher de penser qu’elles sèment le germe de troubles futurs au lieu d’assurer le repos et la tranquillité de celle partie de l’Europe.


Il ne faut pas craindre de continuer ces extraits : les réflexions qu’ils sont propres à faire naître iront certainement au-devant des nôtres.

  1. La convention dont parle M. Harris fut signée à Pétersbourg le 17 février 1772 entre la Prusse et la Russie; l’Autriche adhéra le 4 mars. Cette première convention fut suivie d’une seconde, conclue à Pétersbourg entre les trois cours le 5 août.