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Dans l’état actuel des choses (1862), les expéditions de farines pour la halle ou la boulangerie parisienne sont faites par 500 meuniers des départemens voisins ; mais 75 d’entre eux seulement fournissent plus de la moitié des marchandises. On a employé en 1862 dans le département de la Seine 2,256,989 quintaux métriques de farines, qui ont produit eu pain 29(î millions de kilogrammes, équivalant à une consommation moyenne de 434 grammes par tête et par jour. La boulangerie a fait moins d’achats dans le cours de cette même année que pendant les années précédentes, parce qu’elle avait encombré ses magasins dans la prévision d’une forte hausse, que ses dépôts dans les greniers publics lui ont été en partie rendus, et enfin parce que le rendement de la farine à la panification a dépassé de beaucoup la moyenne officielle[1]. La boulangerie n’a eu à se procurer en 1862 que 1,956,000 quintaux métriques, et voici sous quelles conditions elle les a reçus. La meunerie lui a confié 924,000 quintaux sous forme de marché à cuisson ; elle a traité, par achats directs et de gré à gré, pour 1,032,000 quintaux. Dans tout cela, les acquisitions faites à la halle, celles sur lesquelles les mercuriales sont basées, fourniraient un chiffre tellement imperceptible, que l’administration a cessé de l’indiquer. Ce n’est plus même un vingtième.

L’intérêt qu’ont les agioteurs à modifier en hausse ou en baisse les mercuriales, et les facilités qu’ils ont pour le faire ayant été constatées dès 1854, la commission d’enquête avait proposé d’élargir les bases de la taxe en faisant entrer dans le calcul des moyennes non-seulement les cours de la halle, mais les ventes particulières à domicile et les marchés à cuisson. Le conseil municipal n’a pas voulu y comprendre les cuissons, parce que ce marché n’étant pour le meunier que le moyen de vendre sa farine plus cher à des gens forcés de subir sa loi, il en serait résulté une élévation de la taxe au profit de ces mêmes meuniers et au préjudice des consommateurs. Dans le dernier règlement, qui vient à son tour de disparaître, la taxe avait pour base le cours de la halle combiné avec les ventes à domicile : de cette manière, la moyenne était prise en apparence sur la moitié des quantités consommées. En réalité, c’était toujours l’agiotage qui faisait la loi. Quand existe un cours public, constaté par des officiers ministériels, il n’est jamais possible de s’en éloigner beaucoup. Si le farinier, quand il fait ses offres, voulait vendre plus cher que le cours, le boulanger irait acheter à la

  1. Le boulanger doit compte à l’administration de 130 kilos de pain pour 100 kilos de farine. En 1861, la farine étant malsaine, il n’a pu obtenir que 126 kilos ; en 1862 au contraire, le rendement a pu être aisément porté à 131. Ce contraste montre à quelles vicissitudes le boulanger est exposé sous le régime de la taxe.