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mande à la table si quelque esprit est présent, et désire faire une communication. La table frappe vivement trois coups, ce qui veut dire oui dans son langage. « Qui est là? demande de nouveau le médium. » Cinq coups lui répondent, ce qui indique l’appel à l’alphabet. La conversation commence, assez lente d’abord, en raison d’un moyen imparfait, car il faut que chaque lettre s’accuse par le nombre de battemens qui en exprime le rang alphabétique; mais bientôt le médium dirige et gouverne l’entretien de manière à le hâter. Mille moyens ingénieux se présentent. Par exemple, « on épela les mots suivans : — Nous désirons que vous croyiez dans le... — On s’arrêta là. On demanda à l’esprit : — En quoi dois-je croire? Dans le médium? — Non. — Dans les manifestations? — Non. — À ce moment, l’investigateur fut doucement frappé sur le genou, et, comme il y porta la main, il y rencontra une croix que l’esprit y avait placée, et qui termina ainsi la phrase d’une façon significative. » Ainsi qu’on le voit, les esprits n’ont pas seulement leur alphabet, leur orthographe, leur grammaire; ils ont aussi des artifices de langage particuliers, leur rhétorique propre. On pourrait, en réunissant un certain nombre de traits épars dans le livre des Révélations, mettre dans tout leur jour les méthodes que M. Home emploie pour ne faire tenir aux êtres surnaturels qu’il évoque que des propos de nature à satisfaire et à étonner son public. On verrait avec quelle habileté il manœuvre sur le terrain mouvant où il s’est placé, avec quel art il provoque des personnes présentes les demi-confidences qui doivent servir de thème aux indications des esprits, avec quelle finesse il se sert des moindres ressources, comment il bat en retraite quand il s’est trop compromis, comment il se tire avec éclat d’un mauvais pas, tournant à son avantage ce qui a failli le perdre, comment il se ménage des prédictions brillantes et d’éloquentes évocations; mais nous en avons dit assez pour donner une idée générale de ces séances mystérieuses. Nous savons maintenant ce qui s’y passe, et nous avons pu même quelquefois, chemin faisant, toucher du doigt les procédés du thaumaturge.

Toute cette fantasmagorie a été trop percée à jour depuis quelque temps pour qu’il soit encore utile d’en étudier les ficelles. Nous tirerons un autre genre d’enseignemens de l’examen que nous venons de faire. Où veut en venir M. Home avec cet étalage de choses prodigieuses? Quel but se propose-t-il? De se faire une position dans le monde, dira-t-on, et d’exploiter la thaumaturgie!... Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Ainsi que nous l’avons déjà indiqué, ce n’est pas à ce point de vue que nous nous arrêtons. Nous nous bornons à regarder M. Home sous l’aspect où il veut bien se montrer. Quelle prétention affiche-t-il, quelle idée flatte-t-il dans le public auquel il s’adresse? Dans quels élémens cherche-t-il son succès? Voilà seu-