de réviser en ce moment l’ensemble de notre politique étrangère. L’Angleterre, refroidie envers nous, n’oublie point nos annexions, ne dissimule pas ses défiances, nous taquine un peu partout, et ne nous encourage qu’aux entreprises hasardeuses qui ne sont, comme en Amérique, que des diversions opérées à son profit. La Russie, animée contre nous, caresse l’Angleterre, et lui accorde, assure-t-on, un dépôt de charbons à Sébastopol ; l’Autriche se sert de nous pour se faire un rôle en Allemagne, et ne nous fournit aucun appui sérieux pour la Pologne : condescendra-t-elle à nous donner un empereur pour le Mexique ? La Prusse est plus que jamais enchaînée à la Russie. Nous avons inquiété les États-Unis par les sympathies imprudentes que nous avons témoignées à la rébellion du sud et par nos projets de restauration monarchique au Mexique. Si, détournant nos regards de ce maussade tableau de la politique étrangère, nous portions nos regards sur la politique intérieure de la France, peut-être n’y aurait-il pas lieu de se rallier aux théories politiques que M. de Persigny vient de développer avec complaisance dans un cercle de Saint-Étienne. Peut-être le meilleur moyen de parer aux difficultés de notre politique extérieure serait-il, quoi qu’en pense l’ancien ministre de l’intérieur, de songer et de mettre la main aux réformes libérales attendues par l’opinion publique. Nous n’adoptons point les conclusions du discours de M. de Persigny ; mais nous ne sommes point fâchés de la hardiesse avec laquelle il pose certaines questions « en mots exquis et sentences congrues, » comme dit notre Rabelais. Nous avons été charmés par exemple de l’entendre citer Montesquieu et professer sous ce grand patronage le culte de la division des trois pouvoirs. Nous espérons que l’opposition répondra, au mois de novembre, avec une suffisante vigueur au discours de l’ancien ministre de l’intérieur, et qu’elle nous apprendra comment a été pratiqué aux dernières élections le principe de la division du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif.
E. FORCADE.
Le théâtre se transforme d’une étrange façon depuis quelques années ;
peut-être devrait-on dire que depuis le commencement du siècle, depuis
la fin même de l’âge précédent, il n’a cessé de se transformer. Arrêté un
instant après l’organisation que lui avaient donnée les grands génies du
XVIIe siècle, et fixé, à ce qu’il semblait, en de certains cadres bien définis où
les hommes de talent qui succédèrent aux maîtres l’avaient maintenu, il
s’ébranla subitement un jour en face de Voltaire, continuateur fidèle en aprence et zélé défenseur des conventions classiques en littérature ; il s’ébranla d’abord, — chose piquante, — sous la main d’un auteur de second