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procuration, il l’accompagna en Angleterre. Son récit nous montre combien il fondait peu d’espoir sur le bonheur de cette union, et quoique rien dans cette affaire n’eût été laissé à sa discrétion, cependant le prince, avec lequel il avait été jusque-là dans des termes d’intimité et de confiance, ne lui pardonna jamais la part qu’il y avait prise.

« En 1796 et 1797, il alla à Paris et à Lille tenter des négociations de paix avec la république française. Peu après cette dernière mission, il fut atteint de surdité à un point tel qu’il s(; regarda comme désormais impropre à tout emploi extérieur important.

« En 1800, il fut fait comte et reçut en même temps le titre de vicomte Fitz Harris. M. Pitt avait le projet de se servir de lui ou de M. Grenville pour renouveler des propositions de paix avec la France; mais lord Malmesbury se retira définitivement de la diplomatie, et c’est M. Addington qui fit la paix d’Amiens.

« Lord Malmesbury, par suite de son infirmité, continua à refuser, des ministres et de leurs successeurs, tout emploi, soit dans le cabinet, soit au dehors; mais pendant toute la vie de M. Pitt et du duc de Portland il resta dans l’intimité et conserva toute la confiance politique de ces hommes d’état et de leurs principaux collègues. En 1807, il fut nommé lord lieutenant du comté de Hants.

« Depuis ce moment jusqu’à la fin de sa vie, il partagea presque tout son temps entre Londres et Park-Place, nom de sa terre près d’Henley. Sa maison était ouverte à la nouvelle génération d’hommes d’état et de littérateurs, et il les recevait avec autant de plaisir qu’il en avait trouvé dans le commerce des plus distingués de ses contemporains. Il fut des premiers à apprécier les talens de M. Canning, de lord Grenville, de lord Palmerston et de George Ellis. M. Canning nomma, en 1807, sous-secrétaire d’état aux affaires étrangères le fils de lord Malmesbury, lord Fitz Harris, que M. Pitt avait déjà placé à la trésorerie.

« Après l’occupation de la Hollande par Napoléon, le stathouder exilé et l’héroïque princesse d’Orange furent les hôtes constans de lord Malmesbury tant que dura leur éloignement d’un pays qu’il avait naguère sauvé de la domination française[1]. Il vécut assez pour les y voir rentrer.

« En 1814, il fut consulté par le ministère de lord Liverpool sur la nouvelle division territoriale de l’Europe, et les arrangemens relatifs à la Hollande, la Belgique, le Luxembourg et la Prusse furent principalement suggérés et réglés par lui. »


Telle fut la longue carrière de lord Malmesbury. La simple énumération des fonctions qu’il remplit, des événemens dont il fut le témoin, des négociations auxquelles il prit part, suffit pour donner une idée de l’intérêt que présenteraient le journal et les correspondances d’un homme même ordinaire placé dans de pareilles condi-

  1. Nous verrons en son lieu que ce que l’auteur de la notice appelle sauver les Provinces-Unies de la domination française n’était autre chose que les soumettre à la domination anglaise.