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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 juillet 1863.

Les réponses du gouvernement de Pétersbourg aux notes de la France, de l’Angleterre et de l’Autriche font faire un pas décisif à la question polonaise. Les dépêches du prince Gortchakof ont surpris le public comme une détonation inattendue. On n’avait pas prévu de la part de la Russie un refus aussi péremptoire, aussi énergiquement exprimé. Le ton doucereux des premières répliques russes avait donné à croire que la diplomatie moscovite essaierait de se tirer de ce pas difficile par un mélange de temporisation et d’enguirlandage, par des demi-concessions enveloppées de paroles mielleuses. Nous ne sommes pas fâchés qu’il n’en ait point été ainsi; nous nous félicitons que la violente franchise du prince Gortchakof ait mis l’Angleterre, l’Autriche et la France au pied du mur. Ce retour offensif de la diplomatie russe est ce que l’on pouvait désirer de mieux pour éclairer l’opinion sur la question polonaise et affermir les résolutions des gouvernemens qui ont cru devoir se préoccuper de la cause de la Pologne.

Il y a deux parties dans les réponses du prince Gortchakof : des considérations générales et une tactique diplomatique. La faiblesse des considérations générales sur lesquelles s’appuie le ministre russe enlève toute autorité à son procédé diplomatique. Nous qui avons à tenir compte avant tout des principes moraux qui servent de guide à l’opinion civilisée, des principes qui intéressent la conscience humaine à un bien autre titre que les rubriques de la procédure politique, nous nous arrêterons d’abord aux considérations générales mises en avant par le prince Gortchakof.

Elles se réduisent à des déclamations ou à des prétentions démenties par les événemens qui se passent sous nos yeux. Le gouvernement russe en est encore à dénoncer dans les mouvemens de la Pologne les inspirations et les efforts de la révolution européenne. Il précise avec amertume cette accusation à l’adresse de la France : il signale Paris même comme l’un des principaux foyers de l’agitation polonaise. Parlant à notre gouvernement