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parti libéral, a échoué à Bruges, où M. de Vrière n’a été élu qu’au second tour. Une perte regrettable pour la chambre est celle de M. d’Hoffschmidt, ministre des affaires étrangères du cabinet de 1847, récemment nommé ministre d’état, qui a été supplanté à Bastogne, à une faible majorité, par un inconnu. L’opposition catholique a gagné les voix perdues par le parti libéral. Soixante et un libéraux partisans du ministère auront à faire face, à la chambre des représentans, à une opposition compacte de 55 voix. Une telle balance des partis politiques va devenir pour la Belgique une difficulté de gouvernement. Le ministère libéral aura plus de peine à garder le pouvoir, sans que le parti catholique soit en état de le prendre. Cette situation rendra-t-elle les cléricaux plus modérés, et fera-t-elle disparaître les divisions dont on a vu quelquefois le germe au sein du parti libéral ? Les prévisions sont sur ce point intempestives ; la prochaine session du parlement belge nous montrera dans quel sens va se dessiner l’attitude des partis.

E. FORCADE.


REVUE MUSICALE


LES CONCERTS DE LA SAISON


Je ne suis pas de ceux qui vont se plaignant du nombre considérable de concerts qui se donnent chaque année à Paris. Comme on est libre de choisir son délassement, et qu’on n’a pas encore songé à nous donner une loi qui nous force à nous amuser d’une manière plutôt que d’une autre, il faut que les esprits moroses, qui ne comprennent rien aux beautés d’un art admirable, se résignent à voir le public courir à ces belles fêtes où l’on exécute les chefs-d’œuvre du quatuor, de la symphonie et de la grande musique classique et vocale qu’on n’entend pas dans les théâtres. Qui peut nier ce fait qui frappe tous les yeux ? le goût de la musique, de la musique pure, sans action et sans paroles, a fait de grands progrès en France et se répand chaque jour davantage dans toutes les classes de la nation.

Ce phénomène curieux, qu’on voit se produire à des degrés différens chez tous les peuples de l’Europe, étonne quelques penseurs honnêtes ; il excite surtout la mauvaise humeur de beaucoup d’écrivains et d’hommes politiques à courte vue qui voient dans ce développement d’un art nouveau un signe de décadence morale. J’ai entendu soutenir par un prétendu homme d’état de 1848 que ces sociétés chorales qui couvrent aujourd’hui le sol de la France, que ces phalanges d’ouvriers qui, sous le nom d’orphéonistes, se réunissent dans chaque localité pour chanter des mélodies harmonisées, aussi simples que les sentimens qu’expriment les paroles, enfin que ces institutions nouvelles et pacifiques, que protègent avec juste