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d’une dureté moyenne, en évitant les assises inférieures qui dégénèrent en une cendre friable, en une pouzzolane où plongeaient ces arenttriœ ou carrières de sable avec lesquelles on a voulu les confondre. Généralement elles ne sont point maçonnées ni voûtées, excepté celle de Saint-Sébastien, qui est construite en pierre et sort à moitié hors de terre, mais elles sont taillées un peu irrégulièrement dans la masse solide en longues galeries dont la plus grande hauteur est de 2 à 3 mètres et la plus grande largeur de 90 centimètres à 1 mètre. Le développement de ces catacombes est immense, si l’on en juge par le cimetière de Sainte-Agnès, Via Nomentana. La carte qui en a été dressée comprend un huitième de son étendue sur une ligne de plus de trois kilomètres, et l’on en induit que la longueur totale des galeries des catacombes dépasserait 1,400 kilomètres ou 380 lieues. Sur tout ce parcours, les rangées latérales de sépultures rapprochent des tombes de toutes les grandeurs, superposées en nombre inégal, depuis trois ou quatre jusqu’à treize ou quatorze, les unes au-dessus des autres. On calcule que par chaque 21 décimètres de chemin il y en a cinq de chaque côté. C’est ce qui donnerait près de sept millions de tombes. Ces soixante cimetières auraient, suivant quelques auteurs, servi pendant cinq ou six siècles à la partie chrétienne de la population de Rome. Celle-ci est estimée, dans les premiers siècles de l’empire, à deux millions d’âmes[1]. À supposer que les générations se renouvellent trois fois par siècle, la population chrétienne, aurait en moyenne approché du cinquième de la population totale de Rome ; mais ce chiffre, très exagéré avant Constantin et surtout de Tibère à Trajan, est infiniment trop faible pour les Ve et VIe siècles. On comprend de reste combien de telles évaluations sont hypothétiques[2].

Les catacombes sont donc des cimetières, et à Rome on leur en donne le nom. Rien en effet n’y semble avoir été creusé et disposé que pour recevoir et honorer les morts. Chaque tombe paraît faite exprès pour le mortel qu’elle devait contenir. Des milliers n’ont que la taille d’un enfant ; quelques-unes sont assez grandes pour deux corps et même davantage. On les appelle alors du nom de bisomum ou de trisomum et quadrisomum. Elles étaient fermées avec une plaque, une tuile ; mais la plupart ont été ouvertes, au moins dans la partie des catacombes déblayée jusqu’ici, et l’on n’y voit plus guère qu’un enfoncement presque vide, du sable et des débris d’ossemens.

  1. Deux millions quarante-cinq mille, suivant le dictionnaire de Smith. Quelques-uns croient que l’inhumation dans les catacombes n’a pas duré au-delà de l’année 340.
  2. Elles s’appuieraient sur ces bases conjecturales : l’étendue totale des catacombes, le nombre des sépultures, la durée ne l’emploi des cimetières souterrains, le chiffre de la population de Rome, le nombre des générations par siècle.