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indépendante du milieu ambiant ; la plante se met en équilibre de température avec ce qui l’entoure. Ce n’est que dans certains cas particuliers, dans le cas de là germination et au moment de la floraison, que les phénomènes sont inverses, que la plante absorbe de J’oxygène, et qu’en vertu de cette combustion elle peut élever sa température au-dessus de celle de l’air ambiant.

Où le végétal trouve-t-il toute cette chaleur dont il a incessamment besoin ? Dans l’action solaire. Le végétal emprunte constamment de la chaleur au soleil et l’emmagasine à l’état de force vive calorifique. Que les rayons du soleil tombent sur une plage de sable, le sable s’échauffe, et il renvoie bientôt par rayonnement toute la chaleur qu’il reçoit ; mais que ces mêmes rayons tombent sur une forêt, les arbres continuellement absorbent et s’approprient une partie de leur chaleur. Les matières hydrocarbonées qui se forment sans cesse sur la terre, par exemple les matières spécialement regardées comme combustibles, le bois, la houille, etc., sont ainsi des provisions de force vive accumulées par une transformation lente de l’action solaire, et dont nous pouvons disposer à un instant donné pour les convertir en chaleur, en travail. Quand nous avons amoncelé du charbon dans le foyer d’une machine à vapeur et que nous l’enflammons au moyen d’une allumette, d’où sortira tout le travail que va produire la machine ? Est-ce de l’allumette ? Eh ! non, c’est tout le travail solaire qui a été emmagasiné anciennement dans ce combustible que nous rendons soudainement disponible en abandonnant le charbon à son affinité pour l’oxygène, absolument comme nous pourrions, disposant d’une grande masse d’eau qui aurait été élevée dans un réservoir par un travail antérieur, utiliser la chute de cette eau en ouvrant le robinet du réservoir. Chaque kilogramme de houille renferme ainsi virtuellement trois millions de kilogrammètres. On peut donc calculer facilement la quantité de puissance mécanique, toute préparée, que nous extrayons annuellement du sol de la France quand nous tirons de nos houillères 8 millions de tonnes de charbon. C’est le travail de 10 millions de chevaux-vapeur fonctionnant jour et nuit pendant toute l’année.

C’est encore cette force vive emmagasinée dans les végétaux qui leur donne leur vertu nutritive ; ils introduisent dans le corps des animaux les matières hydrocarbonées que l’oxygène y viendra brûler ensuite. Si ces élémens de régénération manquent, le corps, réduit à s’oxyder lui-même, dépérit et meurt. Cette fonction des végétaux prendra dans notre esprit une importance particulière, si nous réfléchissons que la nourriture animale n’est en quelque sorte que médiate, et qu’il faut remonter aux végétaux pour trouver l’origine de toute nutrition.