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d’analogie avec la flore ou la faune des anciennes époques géologiques. La race noire, au degré le plus abaissé, se montre dans un groupe de sauvages du nord de l’Australie ; leurs membres grêles et allongés rappellent à première vue les proportions du singe. Sont-ils pourtant inférieurs à cette famille de Bushmen qui figure un peu plus loin, race malheureuse qui s’éteint chaque jour dans le sud de l’Afrique, persécutée par les autres tribus indigènes et par les durs colons européens ? Après avoir parcouru ainsi tout le monde noir, on arrive aux Cafres-Zoulous, dont la peau est brune, le front haut et l’intelligence beaucoup plus développée. Chemin faisant, on rencontre des Danakils, menant boire leurs chameaux ; ces Abyssins forment la transition entre le nègre et l’Arabe. Le continent d’Amérique nous présente ses naturels du Mexique, ses Caraïbes, ses Botocudos. Les îles de l’archipel océanique nous montrent une famille de Papouans, qui tiennent à la fois du nègre et du Malais avec leurs cheveux crépus qui ressemblent à une masse d’étoupe. Enfin en Asie, dans un groupe d’Hindous appartenant à différentes castes, et occupés à chasser le tigre, nous trouvons le germe de notre race blanche. Non content de mettre l’ethnologie en action et de représenter les jeux, les occupations, les exercices favoris, la vie domestique des différentes familles humaines, on a voulu encore les entourer des animaux qui expriment le mieux la physionomie des différens climats et auxquels les mœurs de l’état sauvage se relient par tant de rapports. L’intention était excellente, mais l’exécution laisse beaucoup à désirer. La plupart des masques humains ont été, je l’avoue, calqués sur la vie ; les peaux des divers animaux ont été assez bien préparées, et pourtant l’ensemble est petit, les détails eux-mêmes semblent quelquefois puérils ou ridicules[1]. Un Anglais, grand naturaliste, frappé de l’insuffisance de ces calques de plâtre, se demandait un jour pourquoi l’on n’aurait point au Crystaî Palace de vrais sauvages en chair et en os se livrant devant le public à des simulacres de chasse ou de guerre. Cette idée soulève plus d’une objection et rencontrerait sans doute des difficultés ; mais la Grande-Bretagne serait plus à même que toute autre nation de la mettre en pratique à cause de l’étendue de ses relations avec toutes les contrées de la terre.

La partie du Crystal Palace que nous venons de parcourir nous a

  1. Cette réflexion s’applique surtout à la cave dans laquelle on a voulu représenter au moyen de toiles peintes les glaces éternelles du pôle, les animaux de ces régions désolées et un pêcheur groenlandais dans son canot. L’intérêt qui s’attache à ces races de sauvages du nord augmente pourtant de jour en jour depuis qu’on trouve en Angleterre parmi les débris de l’âge de pierre des crânes qui semblent se rapporter au même type.