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remarquable qu’à celle où, au mépris des lois divines et humaines, au mépris de la raison même, fut consommé l’outrage du dernier déchirement de notre patrie ? » Le même jour, les Lithuaniens adhèrent à la confédération générale.


Wilna, 14 juillet 1812.

« Nous, commission du gouvernement provisoire du grand-duché de Lithuanie, administration du département de Wilna, nous les ecclésiastiques du rite latin, grec-uni et de toutes les autres confessions, l’université, la magistrature de justice, maréchal, sous-préfet, avec les citoyens propriétaires, président de la ville avec la municipalité, toutes les corporations de la ville, citoyens et habitans du grand-duché de Lithuanie, aujourd’hui présens dans cette ville, nous nous sommes rassemblés dans l’église cathédrale de Wilna, sous la présidence de leurs excellences MM. les sénateurs et de MM. les nonces à la diète de Varsovie, députés de la confédération générale de la Pologne auprès de sa majesté l’empereur et roi, et après avoir entendu la lecture de l’acte de la confédération générale, qui indique pour base de cette vertueuse entreprise de réunir dans le même corps politique les états partagés du royaume de Pologne et du grand-duché de Lithuanie, et de rendre à notre patrie, d’assurer son existence, sa force et sa prospérité au prix de nos fortunes et de notre sang, nous accédons à la confédération générale de Varsovie en soussignant cet acte de notre adhésion fraternelle de nos propres mains, dans la maison de Dieu, dont nous invoquons la miséricorde et la protection. »


En 1830, la Pologne s’étant soulevée pour ne pas marcher contre la France et pour rappeler la Russie au respect des engagemens de 1815, les anciennes provinces portèrent une remarquable ardeur dans ce mouvement. Charles Rozycki partait alors de la Volhynie, et avec une petite armée ruthénienne, à travers tous les corps russes, il arrivait sous les murs de Varsovie, pour défendre la patrie commune, comme du fond de la Lorraine Jeanne d’Arc était accourue à la délivrance de la ville d’Orléans, assiégée par les Anglais. En eût-il été de même, si la Ruthénie méridionale ne se fût alors sentie polonaise, comme l’ancienne Lotharingie s’était sentie française au XVe siècle ?

Si les anciennes provinces ne sont pas polonaises, pourquoi donc y prie-t-on pour les victimes de Varsovie ? Pourquoi la Russie y a-t-elle ordonné le séquestre et l’état de siège ? On l’a dit avec beaucoup de sens : le gouvernement russe a lui-même indiqué par ces actes quelles sont les vraies limites de la Pologne, c’est-à-dire des contrées qui ont voulu il y a cinq cents ans, qui veulent encore être polonaises. Ce qui prouve le mieux que la libre volonté est le principe et la base de la nationalité polonaise, et que l’esprit de conquête, c’est-à-dire de contrainte, est tout ce qu’il y a de plus contraire