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par Basile, Polotsk, Smolensk, Tchernigov, Pultava, etc. Tout le pays ruthénien sur les deux rives du Dnieper restait à la Pologne, et la Moscovie s’engageait à ne pas les réclamer ; mais la Pologne fut entraînée peu de temps après dans des luttes intérieures et extérieures qui lui firent perdre les limites de 1634. Par la paix d’Oliva, conclue avec la Suède en 1660, la Livonie fut détachée. En 1667, la Pologne reconnut l’indépendance de la Prusse ducale, sécularisée et protestante ; mais le coup le plus terrible lui fut porté par les Cosaques de l’Ukraine. Ce pays était arrivé à se désaffectionner de la Pologne ; et il en résulta des guerres sanglantes. Les Cosaques avaient été complètement battus par le roi Jean-Casimir, dont le cœur est déposé dans l’église de Saint-Germain-des-Prés à Paris. Ils invoquèrent alors l’assistance du tsar de Moscovie, ce qui amena la guerre entre les deux pays voisins. Une trêve fut conclue à Andruszow en 1667, par laquelle la Pologne cédait temporairement à la Moscovie Smolensk, la Séverie et Tchernigov, l’Ukraine de la rive gauche du Dnieper, plus la ville de Kiev, située sur la rive droite. La Dwina au nord et le Dnieper au sud formèrent la frontière. Cette trêve, prolongée en 1678, fut convertie en un traité définitif en, 1686 par Jean Sobieski, qui espérait, à l’aide de ces concessions, entraîner la Moscovie contre les Turcs : il céda, comme il le dit lui-même dans l’une de ses lettres, en faveur de la chrétienté, in favorem christianitatis.

Cependant l’Ukraine ou, comme l’on dit souvent, la Petite-Russie s’était livrée au tsar sous la condition expresse de conserver l’organisation indépendante à elle octroyée par Étienne Batory, roi de Pologne. L’auteur même de l’union avec la Moscovie put s’en repentir sur son lit de mort, car les conditions n’en furent pas remplies. Un écrivain russe nous expliquera les causes de l’incompatibilité d’humeur qui se manifesta entre les Cosaques et leurs nouveaux maîtres. « À cause, dit le prince Troubetzkoï, des allures orientales et des principes arbitraires de la nouvelle monarchie russe (moscovite), cette union ne répondit pas aux besoins de la Petite-Russie, habituée à la liberté dont elle avait joui pendant son existence nationale, » c’est-à-dire sous la suzeraineté de la Pologne. Non-seulement les Cosaques ont dû renoncer à leurs libertés, mais le cabinet de Saint-Pétersbourg, craignant leur esprit d’indépendance et un retour de sympathie pour la Pologne après la grande déception qu’ils éprouvaient, en a transporté vers 1775 la plus grande partie sur le Kouban, où ils portent aujourd’hui le nom de Cosaques de la Mer-Noire. Ceux qui ont pu échapper se sont réfugiés en Turquie, dans la Dpbrudja, où ils sont encore.

Les limites arrêtées en 1667 sont restées les mêmes jusqu’au premier