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derrière le 2e de grenadiers. Pour neutraliser ce retour offensif, il envoie vers le mont Guca deux bataillons qui cherchent le moyen d’attaquer Madonna della Scoperta. Ces deux bataillons rencontrent des colonnes autrichiennes qui les forcent à rebrousser chemin, et qui ; elles-mêmes s’avancent jusqu’à la casa Sojeta, où elles établissent une batterie dont les boulets vont arrêter le 2e de grenadiers, en marche vers Madonna. Les Autrichiens chassent les Piémontais de San-Martino et s’y établissent solidement malgré les vives attaques de la brigade Coni[1]. Deux fois cette brigade pénètre dans le village, deux fois elle en est chassée, et finalement elle se voit réduite à réorganiser ses rangs décimés derrière le chemin de fer. Le général Cucchiari est arrivé à temps pour protéger cette retraite[2]. Le général Fanti n’a pas encore mis en marche un seul bataillon. C’est seulement à onze heures que ses troupes s’ébranlent.

De dix heures et demie à une heure et demie de l’après-midi (quatrième moment), la situation des troupes sardes continue de s’aggraver. Tous les efforts du général Durando n’empêchent pas les Autrichiens de gagner du terrain. La brigade de Savoie contient les troupes de Gaal ; mais le général Koller continue à tourner le flanc droit des Piémontais. C’est alors que quelques pièces d’artillerie, mises en position, arrêtent la colonne de Koller ; elles ont été dirigées de ce côté par le général Forgeot, commandant l’artillerie du 1er corps (Baraguay-d’Hilliers), et, bien que tirant à 1,600 mètres, leur feu bien nourri (au plus fort de l’attaque de Solferino) porte le désordre dans les rangs de la brigade Koller et lui fait rebrousser chemin. Le général Cucchiari essaie encore une fois de rentrer dans San-Martino. Un premier assaut exécuté par la brigade Casale est d’abord couronné de succès : l’église de San-Martino, la Contracania, plusieurs fermes, tombent aux mains de nos alliés ; mais les Autrichiens, reprenant l’offensive, criblent de mitraille, à 200 mètres, la gauche du général Cucchiari. Les bataillons s’ébranlent et découvrent les troupes placées à leur droite ; celles-ci sont emportées par le mouvement rétrograde, et malgré un régiment frais (le 18e de ligne) qui cherche à leur donner la facilité de se rallier, le général Cucchiari se voit obligé d’ordonner la retraite. Il essaie une première fois d’arrêter ses troupes sur le chemin de fer,

  1. C’est à ce moment que Victor-Emmanuel, arrivant au galop sur le lieu de l’action, criait gaîment à ses troupes : « Allons, enfans, il faut reprendre San-Martino, ou l’ennemi nous le fera faire !… » Faire Saint-Martin, en italien, c’est déloger, changer de domicile, et ceci à cause de la date la plus ordinaire des baux de location.
  2. Le général Benedek avait déjà fait partir pour Cavriana un officier charge d’informer l’empereur François-Joseph qu’avant dix heures il aurait coupé les communications entre l’armée sarde et l’armée française.— Italy under Victor-Emmanuel, t. Ier, p. 204.