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même un décret impérial, en date du 19 mai 1857, qui autorise M. Glower, représentant d’une compagnie internationale européenne et américaine, à faire atterrir sur la côte de France, près de Bordeaux, une ligne télégraphique sous-marine touchant au cap Finistère en Espagne, à Lisbonne, aux Açores, et aboutissant à Boston. D’autres compagnies se présentèrent plus tard avec des projets presque identiques. Malheureusement aucune d’elles ne put réunir les fonds nécessaires à l’entreprise, et toutes ces concessions sont en déchéance. La distance totale du Portugal à Saint-Pierre est par cette voie de 4,200 kilomètres, savoir 1,300 de Lisbonne aux Açores, 500 à travers l’archipel et 2,400 des Açores à Saint-Pierre. Cette seconde partie du parcours pourrait même être raccourcie de 300 kilomètres environ en substituant à l’atterrissement de Saint-Pierre, Hé française, celui de Saint-Jean, extrémité méridionale de Terre-Neuve. Dans ces conditions, ce tracé enlèverait encore à l’Angleterre le monopole des communications avec les États-Unis, et c’est probablement le motif pour lequel le projet dont nous parlons a été accueilli jusqu’à ce jour avec trop peu de faveur par les hommes qui se sont spécialement occupés de télégraphie sous-marine.

Entre le Portugal et les Açores, la sonde plonge dans une profonde vallée sous-marine qui peut avoir 700 à 800 kilomètres de longueur et 4,000 ou 4,500 mètres de profondeur au-dessous du niveau des eaux. Le sol se relève autour de l’archipel açoréen, dont les pentes paraissent très abruptes ; il redescend ensuite à 4,500 mètres, remonte en bas-fonds avec environ 1,000 mètres d’eau vers le milieu du trajet, retombe encore une fois à 4,500 mètres sûr une petite longueur, et se relève enfin pour former le banc de Terre-Neuve, qui occupe, au sud-est de cette île, une étendue considérable. Le terrain compris entre les Açores et Terre-Neuve forme donc deux vallées très creuses que sépare une chaîne de hautes montagnes dont le sommet est très rapproché peut-être de la surface des eaux. Il serait nécessaire de chercher sur le banc une ligne assez profonde pour que le câble ne pût être atteint par les ancres des bâtimens pêcheurs. C’est assurément une condition très favorable que la profondeur soit inférieure à 2,000 mètres sur les deux tiers de la longueur totale des Açores à Saint-Pierre. D’ailleurs la ligne dont il s’agit est située tout entière dans la région des alizés, et s’éloigne peu de la route suivie par les navires qui vont du Havre à New-York. Les ingénieurs et les marins anglais, dont ce tracé contrarie les intérêts nationaux, insistent vivement sur les inconvéniens que présenterait la nature volcanique du sol açoréen. Il paraît probable en effet que cette région est sujette à des perturbations