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et se termine à Boston en s’appuyant sur les Açores et sur l’île française de Saint-Pierre. La troisième va directement de l’Irlande à Terre-Neuve ; c’est le tracé qui fut essayé en 1858. Enfin la quatrième ligne traverse l’Atlantique vers son extrémité septentrionale, en profitant des terres à peine connues, l’Islande, le Groenland et le Labrador, qui avoisinent les régions polaires. Il faut discuter scrupuleusement chacun de ces projets pour apprécier les avantages et les inconvéniens qu’ils renferment. Toutes ces lignes, sans contredit seraient utiles, car les relations commerciales entre les deux mondes sont assez actives pour alimenter plusieurs conducteurs télégraphiques. Nous avons plutôt à examiner lequel est le plus praticable et d’une exécution plus facile.

Vers la fin de 1859, un rapport sagement conçu et laborieusement préparé par les soins du baron de Roujoux était adressé au ministre de la marine et des colonies, M. de Chasseloup-Laubat, au sujet de la création d’un réseau télégraphique dont nos principales colonies auraient été les points d’attache. En présence du mouvement si caractéristique de l’époque qui transformera le monde en un marché gigantesque au moyen des révolutions douanières et des lignes télégraphiques, l’auteur pensait qu’il fallait se préoccuper de faire tourner cette transformation au profit de nos possessions extérieures. Il suffit de jeter les yeux sur la carte de l’Atlantique pour être frappé du resserrement des côtes entre l’Afrique sud-occidentale et l’Amérique méridionale, et en même temps pour saisir l’intérêt immense que ce tracé présente pour la France et ses établissemens coloniaux. Au point de départ, en Europe, la France, dont le réseau télégraphique communique avec toutes les nations du vieux continent, et qui seule correspond par terre avec l’Espagne, devient l’intermédiaire obligé entre l’Europe et l’Amérique. Partant de là, le fil traverse l’Espagne et le Portugal, immerge au cap Saint-Vincent, atterrit à Madère, puis aux Canaries, de là au Cap-Blanc, où nous avons eu un poste que nous pourrions reprendre, et vient se raccorder à Saint-Louis à notre télégraphe sénégalien. Malgré l’énorme avantage d’économie que présente le trajet par terre, la situation politique du nord-ouest de l’Afrique ne permet pas d’arriver au Cap-Blanc ou à Saint-Louis par les côtes du Maroc et du Sahara ; d’ailleurs l’importance intrinsèque de Madère et des Canaries justifie en partie les sacrifices du parcours sous-marin. On voit que, dans cette première partie du trajet, la France devient le centre des relations internationales, et que ses communications avec la colonie du Sénégal s’établissent de la façon la plus utile aux intérêts de chacun.

Gorée, située à 200 kilomètres environ de Saint-Louis et au sud