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parvenus à s’échapper, rentrèrent dans Rome avec Attale. L’autre ambassadeur, Maximianus, resta parmi les prisonniers. Ce fut une bonne prise pour Alaric, qui connaissait l’opulence de sa maison et taxa sa tête à trente mille pièces d’or, lesquelles furent aussitôt payées par son père.

Cependant le premier ministre, soit pour rendre la vie aux passions politiques qui commençaient à se calmer, soit pour se procurer par des confiscations nouvelles l’argent dont il manquait, soit enfin pour se rattacher plus étroitement Honorius en ravivant la haine du jeune prince contre Stilicon et sa mémoire, Olympius, disons-nous, mit derechef sur le tapis la conspiration de l’ancien régent. On vit les recherches inquisitoriales, les accusations, les supplices, recommencer comme aux premiers jours de son gouvernement. L’audacieux ministre attaquait sous ces faux semblans de dévouement au prince quiconque pouvait ébranler son crédit en parlant d’accommodement et de paix, car il se formait à la cour un parti de conciliation avec le sénat et d’entente avec Alaric sur des bases raisonnables. Deux frères, notaires ou secrétaires impériaux, Marcellianus et Salonius, étaient à la tête de ce parti naissant, et plus d’une fois, à ce qu’il paraît, ils avaient blâmé la funeste direction qu’Olympius imprimait aux affaires : celui-ci les livra au préfet du prétoire sous l’imputation du crime de lèse-majesté, comme fauteurs et complices du brigand Stilicon. Ces hommes honorables furent appliqués à la gêne; on leur demanda sous le bâton et le fouet l’aveu de ce qui n’existait pas, et que leur bouche refusa de proférer. Ils en moururent, mais le sang innocent retomba sur la tête du persécuteur. Une indignation générale éclata contre lui. Vainement essaya-t-il de se cacher sous le masque hypocrite qui l’avait si souvent protégé; le fanatisme du parti religieux exclusif se refroidissait de plus en plus devant l’incapacité de ses chefs et l’impuissance du gouvernement qu’il avait fondé.

Toutefois le cri de l’opinion publique n’aurait pas suffi pour écarter Olympius, si, par une maladresse insigne, il n’avait mis contre lui certains eunuques du palais nouvellement en faveur. Au milieu des révolutions politiques, d’autres révolutions poursuivaient en effet leur cours dans les antichambres impériales, où l’on se dénigrait, se trahissait, se supplantait mutuellement. Térentius et Arsace, créatures du premier ministre, après avoir régné plusieurs mois sur la garde-robe du prince et dans sa confiance intime, s’étaient vus évincés par de plus habiles, qui naturellement se firent les adversaires du premier ministre. À cette cour molle et imbécile, l’inimitié d’un eunuque était plus à redouter que celle d’Alaric, et l’empereur, étourdi chaque jour d’accusations contre Olympius, résolut enfin de le sacrifier. Celui-ci apprit un jour avec étonnement qu’il était dépouillé de sa charge, et comme il devina la main qui