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saient convenir qu’à des chevaux de trait, avaient été trouvés jusqu’à ce jour dans les sépultures païennes, et l’on ne savait comment les expliquer ; quelques découvertes récentes, ingénieusement commentées par M. Worsaae, ont fini par dissiper les doutes et confirmer une fois de plus les récits des vieux écrivains. Ajoutons que parmi ces objets, datant sans aucun doute des derniers temps du paganisme Scandinave, plusieurs, artistement ciselés, décèlent par leur ornementation une imagination originale dont il sera important de recueillir, à mesure qu’ils se produiront, tous les témoignages.

Je placerais à côté de ces curieuses œuvres d’archéologie un volume qui ne leur cède ni par le dévouement de l’auteur, ni par l’intérêt des recherches. C’est un in-4o intitulé : Maes-Howe. Notice of runic inscriptions discovered during recent excavations in the Orkneys made by James Farrer. La publication est faite à peu d’exemplaires, et de plus for private circulation. Ce qu’elle fait connaître est assez inattendu. La chambre sépulcrale que M. Farrer a mise au jour contient un grand nombre d’inscriptions runiques du moyen âge. Bien que les interprétations des savans du Nord auxquels M. Farrer s’est adressé ne soient pas toujours concordantes, on a du moins pu lire plusieurs fois le mot iorsalafarer, et recueillir ainsi une preuve nouvelle de la part active que les Scandinaves ont prise au grand mouvement des croisades. M. James Farrer est assuré d’avoir rendu un véritable service à l’histoire du Nord en publiantes tels vestiges qu’on était loin de soupçonner. C’est de quoi mettre sur la vraie voie une érudition spéciale, et de quoi ajouter, par des lueurs destinées à grandir, au flambeau de l’histoire générale.

À côté de ces travaux, réelles conquêtes de la science dans le Nord, il est triste de noter des vides dans les rangs du groupe si actif et si justement célèbre qui la représente. Le 22 février dernier mourait subitement dans une des rues de Copenhague un des savans les plus distingués du Nord, M. Eschricht. Grâce à une vivacité d’esprit peu ordinaire, il était encore, à soixante-trois ans, dans toute l’effervescence du travail. Il avait commencé pendant l’été dernier à Paris l’impression en français d’un grand ouvrage sur les cétacés ; nous l’avions entendu lire à notre Académie des sciences un mémoire fort remarqué ; il venait de remplir à Paris et à Londres une mission scientifique donnée par son gouvernement ; il avait publié tout récemment le résultat de ses études sur la reproduction des huîtres, et il était heureux de penser que ses efforts allaient contribuer à rendre à son pays une des plus importantes richesses de ses côtes. À voir cette juvénile ardeur qu’inspirait l’amour sincère, disons mieux, le culte enthousiaste de la science, il semblait que M. Eschricht n’eût rien accompli encore de la tâche patriotique et généreuse qu’il s’était imposée. Et pourtant son nom était déjà rendu célèbre par de remarquables travaux et par des créations fécondes. L’université de Copenhague lui doit un musée