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ébauches de notes s’impriment deux par deux sur la même feuille de papier ; on les met en contact avec une planche de cuivre. Ces planches ne sont pas, ainsi qu’on le croit généralement, gravées en taille douce ; un des inconvéniens de ce procédé serait de rendre le tirage trop lent. Toutes les pièces qui composent les traits caractéristiques d’un billet de banque se trouvent au contraire fixées, ou pour mieux dire vissées, screwed, une à une par un système galvanoplastique et se détachent vigoureusement en relief sur la planche. Chacune de ces planches de cuivre se fabrique à l’intérieur de la Banque par les mains d’une seule personne, et dans une chambre retirée qui ressemble un peu au laboratoire d’un chimiste. Elles sont toutes calquées sur un type, un modèle original dont on ne se sert jamais, mais que l’on conserve avec grand soin pour le reproduire intact de génération en génération. En des détails les plus remarquables d’un billet de banque anglais est la vignette ou le médaillon exécuté par le célèbre peintre Maclise, et représentant une jeune fille avec un bouclier, un trident et une ruche qu’on peut prendre à volonté pour la figure de la reine ou pour le mythe de Britannia. Dans cette même chambre un peu mystérieuse, j’ai vu, reléguées à l’écart, de vieilles planches hors de service qui ont gravé dans leur temps des millions de billets, images en cela de ces hommes qui, après avoir imprimé une valeur aux événemens et à certains actes de la vie, tombent désormais dans l’oubli et l’obscurité. Les squelettes de bank-notes après être sortis une première fois de dessous la presse, se reposent ensuite quelque temps, jusqu’à ce qu’un second ordre du caissier en chef fasse connaître au chef de l’imprimerie le nombre de billets qu’il faut finir pour subvenir aux besoins de la Banque.

Finir les bank-notes, c’est, on le devine, y ajouter la date, le numéro et la signature[1] qui constituent dans le commerce les principaux élémens d’une promesse obligatoire. Cette seconde opération a lieu dans une autre salle de l’imprimerie. Là les notes déjà chargées de certains caractères et de dessins plus ou moins emblématiques passent sous une nouvelle série de presses, stamping machines de l’invention de M. Oldham. Ces dernières, non contentes d’imprimer ce qui manquait encore aux billets de banque, jouent en même temps le rôle d’ouvriers compositeurs. Chaque fois qu’une note vient d’être numérotée, un ressort d’acier, véritable doigt, agit dans l’intérieur de la machine et substitue au type du chiffre qui vient de servir le type du chiffre qui doit marquer la note suivante. Les deux premières lettres et le numéro d’ordre forment les parties

  1. Les billets de la Banque d’Angleterre sont signés, suivant leur valeur, de trois différens noms, un pour les bank-notes de 5 et de 10 liv. sterl., un autre pour les bank-notes de 20, 50 et 100 livres, et un troisième pour celles de 1,000.