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en mission à l’armée du nord, obtint, d’eux les pouvoirs et les forces nécessaires et dispersa ce rassemblement. À son retour à Paris après l’accomplissement de sa mission, il fut nommé, le 14 septembre, membre du comité de sûreté générale. Toujours attaché de cœur au pays dans lequel il avait passé les plus heureuses années de sa vie, il prit, auprès du comité de salut public, la défense des membres du conseil municipal de Beaune, qui avaient montré quelque hésitation à l’époque du 31 mai, et dont Garnier de Saintes, envoyé en mission dans le département de la Côte-d’Or, avait ordonné la destitution et l’arrestation. Le comité de salut public, cédant à ses représentations, ordonna qu’il fût sursis à leur emprisonnement. Garnier de Saintes, irrité, le dénonça lui-même comme fédéraliste, mais le 18 octobre la convention, sur le rapport du comité de sûreté générale, déclara que les imputations dictées au représentant du peuple Bernard contre son collègue Le Bon par quelques malveillans étaient fausses, et que le sursis de l’incarcération des membres du conseil municipal de Beaune était confirmé.

Jusqu’à ce moment, l’attitude de Le Bon à la convention avait été, on le voit, digne d’éloge plutôt que de blâme. Cependant la situation générale devenait de plus en plus critique. Les progrès des armées étrangères sur la frontière du nord, les succès de l’insurrection royaliste dans la Vendée, les mouvemens qui éclataient sur divers points de la France en faveur des girondins, avaient porté au plus haut degré la fureur des jacobins. La convention, dominée par eux, se décida à proclamer le gouvernement révolutionnaire, c’est-à-dire, la dictature de ses comités et la suspension de toutes les garanties légales. La loi des suspects fut votée, le culte religieux aboli ; le tribunal révolutionnaire commença le cours de ses massacres quotidiens. Des membres de l’assemblée, investis, comme représentans du peuple, de pouvoirs à peu près illimités, furent envoyés, les uns auprès des armées, les autres dans les départemens dont la situation paraissait exiger l’action d’un pouvoir énergique. Dès les premiers jours d’octobre, Le Bon avait été désigné pour se rendre, en cette qualité, dans le département de l’Oise, où des troubles avaient éclaté ; mais, retenu auprès de sa femme, qui était sur le point d’accoucher de son premier enfant, il n’avait pas accepté cette mission. Peu de jours après, le comité de salut public le chargea « d’aller étouffer des tentatives contre-révolutionnaires qui s’étaient manifestées à Aire et dans d’autres communes du Pas-de-Calais. Le Bon cette fois ne crut pas pouvoir se refuser au nouveau témoignage de confiance qu’on lui offrait, et quinze jours s’étaient à peine écoulés que le comité, en lui exprimant sa satisfaction du succès de ses premières mesurés, étendit ses pouvoirs aux départemens circonvoisins où la suite de ses opérations rendrait sa présence nécessaire.