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afin de mieux arriver à ses fins, et use de ménagemens vis-à-vis de ceux qu’elle veut suppléer. Elle n’en marche pas moins, malgré les résistances, vers la conquête d’un beau domaine. Ce qu’il y a, en fait d’écoles, de vigoureux, de bien organisé, lui échappera sans doute ; ce qui ne saurait lui échapper, c’est ce lot ingrat que forment, en tout pays et sous tous les régimes, les classes dénuées de ressources, et qui, sans un énergique effort, ne sortiraient jamais de l’abjection où elles croupissent. Voilà une clientèle acquise au gouvernement et qui lui sera peu disputée. L’éducation s’y complique de moyens de police que le zèle particulier ne saurait avoir à sa disposition. Il faut suivre, dans ce domaine de la misère et de l’ignorance, le mouvement de l’instruction élémentaire et rendre sensibles les difficultés de la tâche, en montrant ce que sont les hommes sur lesquels on s’est proposé d’agir.


III

Vérifions d’abord où en sont, pour la diffusion de l’enseignement, les populations anglaises. Le nombre des enfans pour l’Angleterre et le pays de Galles est évalué à 5 millions environ. Sur ces 5 millions d’enfans, un quart appartient aux moyennes et hautes classes, qui se suffisent à elles-mêmes, ce qui réduit le total à 3,750,000 enfans. En décomposant ce chiffre, on trouve 60,000 congrégationalistes, qui ne veulent à aucun prix de l’assistance de l’état, et 340,000 enfans de pauvres, qui n’ont guère que ce moyen de s’instruire. Restent 3,300,000 enfans qui doivent s’élever ou à leurs propres frais ou aux frais du public, en comprenant dans ce mot l’individu, la paroisse et le gouvernement. Dans ce nombre, le gouvernement en compte 1,600,000, à raison des alternances, dans les écoles qu’il subventionne et assujettit à l’inspection, tandis que 800,000 fréquentent des écoles affranchies de cette dépendance. Il ne reste donc que 900,000 enfans à peu près qui ne reçoivent aucune espèce d’éducation.

Voici maintenant un autre calcul, comme complément de celui qui précède. Par des moyennes faites avec beaucoup de soin et portant sur un grand nombre de tableaux, il a été établi qu’à y tout comprendre, le coût de l’éducation élémentaire est de 30 shillings par tête et par an. S’il s’agissait de mettre d’un bloc à la charge de l’état ces 30 shillings multipliés par les 900,000 enfans qui restent dépourvus de culture, les plus hardis partisans des empiétemens officiels reculeraient devant la dépensé ; mais en supposant que le partage se fît comme il se fait dans beaucoup de cas, un tiers la paroisse, un tiers la libéralité individuelle, un tiers le trésor public, la somme à trouver ne serait pas si excessive qu’on ne pût dès à